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21/11/2008

L’ACTION DE PRIORITE DANS L’OHADA


Encore appelée action privilégiée, l’action de priorité est celle qui procure à son titulaire des droits que n’accorde pas l’action ordinaire.

Même si on a estimé pendant longtemps que la possibilité d’émettre des actions privilégiées heurtait le principe fondamental en droit des sociétés de l’ « égalité entre actionnaires » (CORDONNIER « L'égalité entre actionnaires » ; Thèse Paris 1924 / P. Bissara, P. Didier et P. Misserey, « L'égalité des actionnaires : mythe ou réalité ? » ; Cah. dr. entr. n° 5, 1994. 18 s / J. Mestre « L'égalité en droit des sociétés (aspects de droit privé) » ; Rev. sociétés 1989. 400 / Or L'égalité doit se mesurer, en réalité, au sein d'une même catégorie d’actions. Etant donné qu’il n’est pas de l’essence de la société anonyme de donner des droits identiques, il devient possible d’accorder des droits différents à des actions différentes (Cass. 3e civ., 24 mars 1971 : Bull. civ. III. n° 210) / Vr aussi G. Ripert et Roblot par M. Germain, Traité de droit commercial, t. 1, LGDJ 1996. 846),
des distinctions ont toujours été faites à travers l’histoire, par les législations étrangères entre les actionnaires, en fonction de la nature ou de l’étendu de leur contribution dans la société (A. Lefebvre Teillard « La société anonyme au XIXe siècle », PUF 1985. 166 et s / H. Lévy-Bruhl « Histoire juridique des sociétés de commerce en France aux XVIIe et XVIIIe siècles » Domat Montchrestien 1938, p. 209 s.
Cass. req., 20 déc. 1882 ; D. 1883, 1. 301 / CA Paris, 28 mai 1884 ; D. 1886, 2. 177 ).

Le droit anglais par exemple a toujours distingué nettement les actions ordinaires [ordinary shares, equities ou equity shares] des actions privilégiées [preference shares] (A. TUNC « Le droit anglais des sociétés anonymes » ; D 1987. 149 ). Aux Etats-Unis, les actions de préférence [preferred shares ou preferred stock] sont utilisées fréquemment dans les sociétés cotées (R.H. Folsom et A.A. Levasseur « Pratique du droit des affaires aux Etats-Unis » ; Précis Dalloz 1995. 255). L’Allemagne, la Hollande, l’Italie, la Suisse ou encore la France différencient depuis plusieurs années dans leur législation les actions privilégiées des actions ordinaires (Oeniger « Les actions de priorité en droit suisse, allemand et français » ; Thèse Lausanne 1928).

C’est donc tout naturellement que le législateur de l’OHADA en emboîtant le pas à ses homologues étrangers, consacre avec l’article 755 de l’Acte Uniforme sur les sociétés commerciales, la validité de l’action de priorité qui jouit d’avantages par rapport à toutes les autres actions.

En réalité, le contraire aurait été surprenant. Mieux que la sécurisation juridique et judiciaire des activités économiques, l’objectif affiché du législateur de l’OHADA est la relance des investissements dans le continent africain.

Or tout l’intérêt pratique de l’action de priorité est d’attirer ou au moins d’encourager les investisseurs.

A la constitution de la société, l’émission de ces actions peut permettre de donner la préférence à une catégorie d’actionnaires (C. FERRY, R. Cannard, M. Cretté « Les actions de priorité » ; Dr. sociétés, Actes pratiques, 1993, n° 11. 2 ).

Au cours de la vie sociale, elle peut favoriser de nouveaux investissements et en cas de difficulté, les avantages consentis compenseront les risques pris par le nouvel investisseur.

Sur un plan strictement comptable et financier, lors d’une fusion entre une société prospère et une société qui l’est moins, l’action de priorité peut être un instrument de protection des actionnaires de la société en position de force, les avantages peuvent en effet conduire ces actionnaires à accepter plus facilement l’opération.

D’ailleurs, il a même été démontré que l’action de priorité pouvait faciliter la transmission d’entreprise (V. R. Gaudet « Paiement des dividendes en actions de priorité : un outil de transmission d'entreprise progressif et efficace » ; Dr. et patrimoine, juin 1997. 35 ).

Les investisseurs déterminants pour l’avenir d’une société peuvent ainsi accompagner leur intervention en utilisant l’action de priorité comme mesure de sécurité.

Tout en participant à favoriser la relance des investissements, l’action de priorité de l’OHADA s’inscrit aussi, dans un mouvement de diversification des valeurs mobilières (Th. Bonneau « La diversification des valeurs mobilières ses implications en droit des sociétés » ; RTD com. 1988. 535). Son utilité doit contribuer à lui donner une place déterminée parmi les titres susceptibles d’être émis par les sociétés de l’OHADA.

Aux termes des dispositions de l’article 755, «…, lors de la constitution de la société ou au cours de son existence, il peut être créé des actions de priorité jouissant d’avantages par rapport à toutes les autres actions. Ces avantages peuvent notamment être une part supérieure dans les bénéfices ou le boni de liquidation, un droit de priorité dans les bénéfices, des dividendes cumulatifs ».

S’il ressort de ce texte que l’action de priorité bénéficie de préférences diverses, toute la problématique reste celle des règles qui doivent alors gouverner son organisation (Vr Thierry GRANIER « L’action de priorité » ; Jurisclasseur sociétés).

La présentation de ces règles peut s’effectuer par une description de sa création, par une étude des différents avantages qu’elle peut conférer et par une analyse des modalités de sa disparition.

I- L’EMISSION DE L’ACTION DE PRIORITE

A- Création d’actions de priorité au moment de la constitution de la société

- R. PERCEROU « La notion d'avantage particulier », in Dix ans de conférences d'agrégation, Études de droit commercial offertes à J. HAMEL ; Dalloz 1961. 171
-
J.-J. DAIGRE, F. MONOD, F. BADESVANT « Les actions à privilèges financiers » ; Dr. Sociétés, Actes Pratiques, 1997, n° 32. 4
- Articles 400 et suivants de l’Acte Uniforme
- P. ENGEL et P. TROUSSIERE « Création de catégories d'actions et stipulations d'avantages particuliers » ;
JCP E 1996, I, 585
- P. ENGEL et P. TROUSSIERE « Création de catégories d'actions et stipulations d'avantages particuliers » ; Précité / F.-D. POITRINAL « Clauses statutaires de répartition des bénéfices » ; Dr. et patrimoine, avr. 1998. 39 / P. MERLE, Droit commercial, sociétés commerciales, Précis Dalloz 1998. 307 / Y. GUYON, Traité des contrats les sociétés, LGDJ 1997. 174 / G. RIPERT et ROBLOT par M. GRMAIN, Traité de droit commercial, t. 1, LGDJ 1996. 840

B- Création d’actions de priorité au cours de la vie sociale

Vr Article 588 de l’Acte Uniforme

II- AVANTAGES CONFERES PAR L’ACTION DE PRIORITE

A- Les avantages financiers

- F. Monod « Droits financiers attachés aux actions privilégiées » ; Dr. sociétés 1995, chron. 3
- Article 145 de l’Acte Uniforme « les statuts peuvent prévoir l’attribution d’un premier dividende qui est versé aux titres sociaux dans la mesure où l’assemblée constate l’existence de bénéfices distribuables et à condition que ces bénéfices soient suffisants pour en permettre le paiement… »
- C. Ferry « Les nouveaux rôles des actions de priorité amortissables » ; Dr. et patrimoine, mars 1994. 29
- F. Monod « Droits financiers attachés aux actions privilégiées » ; Dr. sociétés 1995, chron. 3
- S. Dana-Demaret ; Rép. Sociétés Dalloz, V° Capital social. n° 212

B- Les privilèges non financiers

- Vr M. Germain « Transparence et information » ; Petites affiches 19 nov. 1997, p. 16
- G. Berlioz « Comptabilité et ingénierie juridico-financière » ; RD compt. 1996, p. 103
- Vr notre article « L’information des actionnaires minoritaires dans l’OHADA : Réflexion sur l’expertise de gestion » ; Ohadata D-05-56 (www.ohada.com)
- G. J. Virassamy « Les limites à l'information sur les affaires d'une entreprise » ; RTD com. 1988, p. 179
- Vr F.-D. Poitrinal « Les limites des droits non financiers attachés aux actions de priorité » ; Banque 1998, n° 589, p. 50
- Vr F. Monod « Les actions privilégiées : un levier pour l'investisseur minoritaire » ; Banque 1994, n° 549, p. 58
- M. Jeantin « Les clauses de préemption statutaires entre actionnaires » ; JCP E 1991, I. 49
- J.-P. Bouère « Quelques remarques sur les clauses de préemption statutaires réservées à une catégorie déterminée d'actionnaires » ; Bull. Joly 1992. 376
- Vr M. Jeantin « La notion de catégorie d'actions » ; D. 1995. 88

III- LA DISPARITION DES ACTIONS DE PRIORITE

A- La suppression des avantages

B- Le rachat des actions par la société émettrice

- Vr A. Couret « Le rachat par une société de ses propres actions comme technique de gestion financière » ; Banque et droit 1997, n° 53. 3
- Vr A. Couret « Le rachat par la société de leurs propres actions » : Brèves observations sur le rapport Esambert ; Dr. Sociétés, mars 1998, chron. 3
- Vr I. Krimmer « La clause de rachat » ; JCP E 1993, I, 223
- Vr notre article « Expertise et prix des titres sociaux dans l’OHADA, Etude de l’article 59 de l’AUSCGIE » ; Ohadata D-05-58 (www.ohada.com)
- Vr Articles 633 et 634 de l’Acte Uniforme

15/11/2008

L’IMPLANTATION DES SOCIETES ETRANGERES DANS L’ESPACE OHADA

Une société étrangère qui souhaite avoir une présence physique dans l’espace OHADA a le choix entre plusieurs possibilités.

A. Le bureau de représentation

Ce bureau de liaison peut être considéré comme la première phase de votre établissement dans l’espace OHADA. Il permet d’étudier plus facilement le marché, d’analyser la faisabilité du projet, de tester l’activité et de promouvoir le produit. Mais il sert uniquement de relai entre la clientèle et la société étrangère.

Le bureau de représentation n’a pas d’activité commerciale propre, Aucune personne salariée ayant un pouvoir pour engager juridiquement la société étrangère (négociation et conclusion de contrats) ne doit y être rattachée.

Il est toutefois possible d’envisager qu’une secrétaire ou un commercial salarié y soit rattaché.
Le bureau de représentation n’est pas un établissement stable de la société étrangère dans l’espace OHADA et par conséquent n’est soumis ni à immatriculation au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier (RCCM), ni à la fiscalité locale.

Sur l’ensemble des documents commerciaux, doivent impérativement figurer, les coordonnées et mentions légales de la société étrangère.

B. La succursale

Dans la pénétration du marché de l’espace OHADA, la création d’une succursale constitue une étape importante.

La succursale est peut être un établissement commercial ou industriel ou même de prestations de services.

Cette succursale devient l’établissement secondaire de la société étrangère dans l’espace OHADA.
Elle est dotée d’une certaine autonomie de gestion et fait juridiquement partie intégrante de la société étrangère.

Les droits et obligations qui naissent à l’occasion de son activité ou qui découlent de son existence son compris dans le patrimoine de la société étrangère.

Elle n’a pas tout comme le bureau de représentation, de personnalité juridique propre, malgré son immatriculation au RCCM.

La société étrangère est responsable des dettes de sa succursale.

La succursale peut exercer une activité commerciale propre et émettre même directement des factures.

Constituant un établissement stable, la succursale est soumise à la fiscalité locale et doit établir sa propre comptabilité.

La société étrangère doit cependant mentionner sur les documents commerciaux de la succursale, les informations qui permettent d’identifier cette dernière.

C. La filiale

La société étrangère qui souhaite intégrer complètement le marché de l’espace OHADA, doit créer une véritable filiale qui sera une société de droit OHADA avec une identité propre.

Elle doit être immatriculée au RCCM.

Il s’agit d’une société juridiquement indépendante et soumise entièrement au droit OHADA et à la fiscalité locale.

Le choix reste ouvert entre une société de capitaux et une société de personne.

Si le choix porte sur une société de capitaux, la filiale sera seule responsable des affaires qu’elles traitent, la société étrangère risque cependant, en l’absence de cautionnement ou de toute autre garantie fournie par elle au profit de la filiale, de perdre son apport initial dans le capital social de la filiale.

QUELQUES INFORMATIONS PRATIQUES SUR LES ASSEMBLEES GENERALES D’ACTIONNAIRES DANS L’ESPACE OHADA

L’assemblée générale annuelle est le moment privilégié pour l’actionnaire de s’informer sur la situation de la société et de s’exprimer sur la gestion sociale.

Son objet principal est l’approbation des états financiers de synthèse de l’exercice qui sont présentés par le conseil d’administration ou l’administrateur général.

Les actionnaires peuvent intervenir pour poser des questions aux dirigeants sociaux.

Un certain nombre de résolutions sont soumises au vote des actionnaires lors de ces réunions, notamment sur l’affectation des résultats, la nomination des membres du conseil d’administration et des commissaires aux comptes, ou encore l’approbation des contrats conclus entre la société et ses dirigeants.

En assemblée générale extraordinaire, les actionnaires sont appelées à voter des résolutions particulières relatives aux modifications des statuts de la société et des autorisations d’émission de titres de capital ou donnant accès au capital.

Comment s’informer ?
Comment participer à l’assemblée générale ?
Comment s’exprimer ?
Comment prendre contact avec les sociétés ?

I- COMMENT S’INFORMER ?

L’actionnaire doit savoir comment s’informer, participer et s’exprimer lors d’une assemblée générale d’actionnaires.

Les actionnaires disposent de deux droits fondamentaux :
celui de se faire communiquer des documents sur la société dont ils sont actionnaires,
celui de poser des questions aux dirigeants sur la gestion et plus généralement la vie sociale,

Le droit de communication s’exerce :

à l’occasion de la réunion des assemblées générales ; c’est le droit de communication « préalable »,

en dehors de toute réunion ; c’est le droit de communication « permanent ».

Les documents que les sociétés sont tenues de mettre à la disposition de leurs actionnaires sont définis de manière limitative par l’article de l’Acte Uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et différent selon qu’il s’agit du droit de communication préalable ou permanent.

Par ailleurs, les sociétés ne sont pas tenues de transmettre certains documents, qui peuvent seulement être consultés sur place.

De manière générale, les documents suivants sont accessibles aux actionnaires :

  • l’inventaire, des états financiers de synthèse et de la liste des administrateurs lorsqu’un conseil d’administration a été constitué,
  • les rapports du commissaire aux comptes et du conseil d’administration ou de l’administrateur général,
  • l’exposé des motifs, des résolutions proposées, ainsi que les renseignements concernant les candidats au conseil d’administration ou au poste d’administrateur général,
  • la liste des actionnaires,
  • le montant global certifié par le commissaire aux comptes des rémunérations versées aux dix ou cinq dirigeants sociaux et salariés les mieux rémunérés selon que l’effectif de la société excède ou non deux cents salariés.
Ces informations peuvent être fournies séparément ou dans un document d’ensemble qui est, le plus souvent, le rapport annuel. Selon qu’il s’agit du droit de communication préalable ou permanent, ces informations sont disponibles pour l’exercice écoulé ou pour les trois derniers exercices.

Ces informations peuvent être obtenues :

  • sous forme d’envoi de la part de la société ; en justifiant de sa qualité d’actionnaire. Dans le cadre du droit d’information préalable, la demande peut être présentée entre la date de convocation à l’assemblée générale et le quinzième jour qui précède la tenue de la réunion. Sauf en ce qui concerne l’inventaire, le droit pour l’actionnaire de prendre connaissance emporte celui de prendre copie à ses frais.
  • en consultation au siège social ou à la direction ; le droit de consultation peut être exercé soit par l’actionnaire, soit par le mandataire désigné par lui pour le représenter à l’assemblée générale, et ce à compter de la date de convocation et au moins pendant les quinze jours qui précèdent la tenue de l’assemblée.
Les informations diffusées par les sociétés
  • Le rapport annuel
Il est l’outil de communication privilégié des sociétés : outre les états financiers de synthèse, il présente l’entreprise, la situe éventuellement par rapport au secteur dans lequel elle exerce son activité, et comporte en général des indications sur les projets de l’entreprise et sa stratégie à moyen et long termes. Souvent enrichi de tableaux, graphiques et organigrammes, il est un outil précieux d’information. Ce n’est pourtant pas un support de communication uniforme et sa forme comme son contenu peuvent varier selon les sociétés.
  • Le rapport d’activité semestriel
L’Acte Uniforme de l’OHADA fait obligation aux sociétés dont les titres sont inscrits à la bourse des valeurs d’un ou plusieurs Etats parties de publier un rapport d’activité semestriel qui commente les données relatives au chiffre d’affaires et au résultat du premier semestre. Ce rapport doit décrire également l’activité de la société au cours de cette période, l’évolution prévisible de cette activité jusqu’à la clôture de l’exercice ainsi que les évènements importants survenus au cours du semestre écoulé.

Les questions écrites

Préalablement à la tenue d’une assemblée générale, tout actionnaire peut poser des questions écrites au président du conseil d’administration, au président directeur général ou à l’administrateur général qui est tenu de lui répondre au cours de l’assemblée.

II- COMMENT PARTICIPER A L’ASSEMBLEE GENERALE ?

Le régime de participation aux assemblées générales prévoit que le droit de participer à une assemblée générale est ouvert aux personnes qui ont acquis des actions de la société concernée ou en sont propriétaire.

La convocation des assemblées est faite par avis de convocation inséré dans un journal habilité à recevoir les annonces légales.

L’avis de convocation doit parvenir ou être porté à la connaissance des actionnaires quinze jours au moins avant la date de l’assemblée sur première convocation et six jours au moins pour les convocations suivantes.

Cet avis de convocation indique outre les informations relatives à la société et à la nature de l’assemblée, où doivent être déposées les actions au porteur ou le certificat de dépôt de ces actions, pour ouvrir droit de participer à l’assemblée, ainsi que la date à laquelle ce dépôt doit être fait.

L’assemblée générale ordinaire ne délibère valablement que si les actionnaires présents ou représentés possèdent au moins le quart des actions ayant droit de vote. Si ce n’est pas le cas, une deuxième assemblée doit être réunie, pour laquelle aucun quorum n’est exigé. L’assemblée générale ordinaire statue à la majorité des voix exprimées.

Quant aux assemblées générales extraordinaires, les quorum exigés sont la moitié des droits de vote sur première convocation et le quart lors de la seconde.

L’assemblée générale extraordinaire statue à la majorité des deux tiers des voix exprimées.

III- COMMENT S’EXPRIMER ?

Les actionnaires peuvent intervenir lors des assemblées générales. S’ils détiennent eux-mêmes un nombre suffisant de titres ou se groupent pour atteindre ce nombre, ils peuvent requérir l’inscription, à l’ordre du jour, d’un projet de résolutions.

La fraction du capital social nécessaire pour déposer un projet de résolution est de :
- 5% du capital social, si le capital de la société est inférieur à un milliard (1. 000 000 000) de francs CFA ;
- 3% du capital social, si le capital de la société est compris entre un milliard (1. 000 000 000) de francs CFA et deux milliards (2. 000 000 000) de francs CFA ;
- 0,5% du capital social, si celui-ci est supérieur à deux milliards (2. 000 000 000) de francs CFA

Le projet de résolution, pour être inscrit à l’ordre du jour et soumis au vote de l’assemblée, doit être envoyé à la société par lettre au porteur contre récépissé, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, par télex ou par télécopie, dix jours au moins avant la tenue de l’assemblée générale.

La demande doit être accompagnée du texte des projets de résolution qui peuvent le cas échéant être assortis d’un bref exposé des motifs.

Les actionnaires peuvent voter par procuration. A défaut d’assister personnellement à l’assemblée générale, l’actionnaire peut donner une procuration à un autre actionnaire ou à tout mandataire de son choix.

La procuration doit comporter les nom, prénom, domicile, nombre d’actions et droit de vote du mandant. Elle comporte en outre l’indication de la nature de l’assemblée pour laquelle la procuration est donnée, ainsi que la signature du mandant précédé de la mention « bon pour pouvoir » et la date du mandat.

La procuration donnée ainsi n’est valable que pour une assemblée. Elle vaut cependant lorsqu’une seconde assemblée ordinaire est convoquée avec le même ordre du jour.

La procuration peut aussi être donnée pour deux assemblées l’une ordinaire, l’autre extraordinaire tenues le même jour ou dans un délai de sept jours.

IV- COMMENT PRENDRE CONTACT AVEC LES SOCIÉTÉS ?

Le service des relations actionnariales des sociétés

Dans les grandes sociétés, il existe parfois un service chargé des relations avec les actionnaires. Les missions de ces services sont la préparation du rapport annuel et des divers documents destinés aux actionnaires (lettres aux actionnaires, convocations aux assemblées, organisation des assemblées générales et des réunions d’actionnaires, la gestion administrative des titres, etc.)
Ce service répond aussi aux questions que les actionnaires individuels peuvent se poser, tant sur l’évolution des cours de bourse que sur des problèmes pratiques tels que le versement des dividendes, les dates d’assemblées générales et les modalités pour y assister ou pour voter par procuration.

Les autres services

Lorsqu’il n’existe pas de service chargé des relations avec les actionnaires, la diffusion des documents d’information et la gestion administrative des titres sont généralement confiées à la direction financière, à la direction de la communication ou encore à la direction générale.

OBSERVATIONS SUR LA NOTION D’ASSOCIE DANS L’AUSC DE L’OHADA

Quand on va à la recherche d’une définition de la notion d’associé, on se rend compte que le législateur de l’OHADA n’en donne aucune.

Il est dès lors possible de considérer qu’une telle définition est toute entière contenue dans la définition de la société donnée à l’article 4 de l’AUSC (Acte Uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du GIE).

Aux termes de cet article, « la société commerciale est créée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent, par un contrat, d’affecter à une activité des biens en numéraire ou en nature, dans le but de partager le bénéfice ou de profiter de l’économie qui pourra en résulter. Les associés s’engagent à contribuer aux pertes… »

On peut dégager de ce texte, les éléments essentiels du critère de la notion d’associé, à savoir ; la mise en commun d’apports et le droit d’intervention sociale.

I- Critères de l’associé

De l’article 4 précité, se dégageraient les éléments du critère de la notion d’associé : la pluralité d’associés, l’affectio societatis, la mise en commun d’apports et la vocation aux bénéfices.

1. Adopter le critère de la pluralité d’associés reviendrait à nier la qualité d’associé à l’unique membre d’une société unipersonnelle.

Supposer que la société est un contrat, donc un accord de volonté impliquerait la conjonction d’au moins deux volontés. La société serait alors une sorte de collaboration exigeant d’œuvrer avec une autre personne.(Vr A. VIANDIER « La notion d’associé »)

Ce premier élément serait difficile à retenir en tant qu’élément du critère de la notion d’associé du fait de l’existence dans de sociétés unipersonnelles comme la SARL ou la SA d’une seule personne.

La pluralité d’associé ne paraît donc pas être un élément pertinent de la notion d’associé, tant il est possible aujourd’hui dans l’espace OHADA d’être associé tout seul.

2. L’affectio societatis est traditionnellement énoncée comme un critère de la qualité d’associé.

D’ailleurs, les partisans de cette notion l’assimilent au consentement au contrat de société, assimilation se réclamant de la signification même du terme « affectio » qui désigne dans le Digeste, la faculté de vouloir, l’intention. (Vr P. DIDIER « La théorie contractualiste de la société » ; Revue de Sociétés, janv - mars 2000 P.95)

Pareil rapprochement ne prendrait pas toute la portée de la notion si on ne tient compte du fait que cette volonté de s’associer, si elle doit exister au moment de la formation du contrat de société, elle doit également perdurer au moment de son exécution.

La majorité des auteurs s’accordent aujourd’hui pour définir l’affectio societatis comme l’intention de s’associer (Vr La Commission de modernisation du langage juridique avec la circulaire française du 15 septembre 1977 ; JCP 1977 / P. SERLOOTEN ; Joly Sociétés Traité, V° EURL, spéc n° 23 / S. VACRATE « La société créée de fait : essai d’une théorisation » ; LGDJ 2003, spéc P. 258 / G. KESSLER « L’objectivation de l’affectio societatis » ; Rec Dalloz 2004 P. 1305).

Sans entrer dans les controverses concernant la notion, on pourrait s’aligner derrière la jurisprudence française pour définir l’affectio societatis comme la volonté pour un associé de collaborer activement, sur un pied d’égalité, à la gestion sociale ou pour y voir, pour le moins, une volonté d’union et d’acceptation d’aléas communs.

3. Si la mise en commun d’apports permet la constitution de la société, à l’inverse, la disparition ou la reprise des apports emporte la dissolution de la société ou manifeste la liquidation de celle-ci.

La mise en commun d’apports constituerait donc un élément indispensable pour l’acquisition de la qualité d’associé.

Mieux, selon RIPERT et ROBLOT, « l’associé apporte pour participer aux bénéfices » et POTHIER dans son traité sur le contrat de société, exprime aussi cette nécessité pour chacune des parties d’avoir vocation aux bénéfices. (Vr R. J. POTHIER « Traité du contrat de société » in Œuvres de Pothier, t 5, 1821)

Les associés s’engagent aussi à contribuer aux pertes, l’investissement étant marqué par l’espoir de gain mais aussi le risque de perte, ce qui constituerait le dernier élément essentiel de la qualité d’associé tiré de la définition du contrat de société donné par l'article 4.

De l’énumération qui précède, l’élément le plus pertinent et le plus illustratif semble être l’apport, auquel on pourrait ajouter comme le souligne le professeur VIANDIER, le droit d’intervention dans les affaires de la société.

II- L’apport et l’intervention dans les affaires sociales

En confrontant l’approche classique qui refléterait la position du législateur de l’OHADA dans la mesure où elle consiste à qualifier d’associé, celui qui apporte un bien tout en ayant vocation aux bénéfices en contribuant aux pertes et étant animé de l’affectio societatis, et l’approche moderne où l’associé est essentiellement le membre du groupement, l’accent étant mis sur les droits reconnus aux associés, il en ressort une approche intermédiaire fondée sur deux critères essentielles de la qualité d’associé, à savoir l’apport et le droit d’intervention dans les affaires sociales.

« L’apport et le droit d’intervention composent le critère de la notion d’associé. l’associé se définit autant par ses prérogatives que par son devoir fondamental (l’apport), ce qui incite à parler plus de statut que de la qualité d’associé ». (Vr A VIANDIER, « la notion d’associé » , op. cit P. 150 et 199)

1. L’apport est indispensable pour l’acquisition de la qualité d’associé. C’est cet apport qui rend compte des autres éléments du contrat de société.

L’associé a vocation aux bénéfices et est animé de l’affectio societatis parce qu’il est apporteur.
L’apport serait donc le seul critère classique utile au regard de la notion d’associé car il commande en effet tous les autres.

Il en découle alors une confusion entre qualité d’apporteur et qualité de partie au contrat de société.

En effet, l’article 4 précité dispose que les parties au contrat de société conviennent « d’affecter à une activité des biens… » alors que l’article 37 du même Acte Uniforme précise que « chaque associé est débiteur envers la société de tout ce qu’il s’est obligé à lui apporter… ».

Les associés sont donc présentés avec ces deux articles comme les parties au contrat, puisque ce sont eux qui conviennent d’affecter à une activité des biens. D’autre part, l’article 37 fonde l’assimilation entre associé et apporteur.

On peut dès lors en déduire que l’apporteur est partie au contrat de société. (Vr Doyen HAMEL « Quelques réflexions sur le contrat de société », mélanges DABIN, tomme II, P. 652)

D’ailleurs, pour le Professeur MATHEY, « il existe un point commun entre les associés véritables et les investisseurs : celui de réaliser un apport à la société. Cet apport est un investissement et cela suffit pour ne pas distinguer entre les investisseurs ». (Vr N. MATHEY ; Bull Joly sociétés, fév 2005, § 45, P 270, spéc . P 274)

Faut-il dans ces conditions prendre en compte comme critère l’affectio societatis ?

L’affectio societatis n’est pas une simple vue de l’esprit. Elle postule une communauté d’intérêts semblant rapprocher les hommes. Elle paraît même diminuer entre eux le degré d’altérité. Elle invite à lever les barrières de la méfiance réciproque et oblige une collaboration effective. (Vr M-A. MOUTHIEU NDJANDEU « L’intérêt social en droit des sociétés » ; thèse d’Etat, Université de Yaoundé II-SOA, mai 2006)

Selon le Professeur VIANDIER « c’est une notion marquée d’incertitudes, liées peut être à sa forte imprégnation psychologique ».

L’affectio societatis ne devrait donc pas être prise en compte car il est délicat d’en faire un critère essentiel. D’ailleurs, le Professeur WHAL soutenait déjà qu’ »à son avis, cette condition, qui dérive du droit romain, doit être rayée ». (Vr A. WHAL, Précis théorique et pratique de droit commercial, Sirey 1922, spéc n° 469)

Que dire de la vocation aux bénéfices ?

La vocation au bénéfice ne semble pas non plus être un critère déterminant. L’idée de gain s’est diluée au point d’absorber celle d’économie.

Cet élément n’est rien d’autre que la conséquence d’un autre critère qui est l’apport et peut donc être défini comme la cause de l’obligation de l’associé qui est d’apporter. ( Vr H. CAPITANT « De la cause des obligations » ; Thèse, Dalloz 2ed 1924, spéc n° 9)

2. Le droit d’intervention dans les affaires sociales serait alors le second élément de la notion d’associé.

Il engloberait le droit pour l’associé de demander des comptes aux dirigeants sociaux et de participer à la détermination des objectifs sociaux. (Vr D. SCHMIDT « Les droits de la minorité dans la société anonyme » ; thèse Paris, 1970)

« Le rapport issu d’un contrat de société, avec la collaboration qui en résulte, implique une ingérence, un contrôle étroit et une faculté de critique dans la manière dont s’accomplissent les affaires communes, c’est-à-dire un pouvoir d’intrusion. (Vr E. THALLER, note sous Req, 3 mars 1903, Rec Dalloz 1904, I, 257)

Ce droit d’intervention se manifeste concrètement par la réunion individuelle du droit de contrôle et du droit d’information.

L’article 125 de l’AUSC ne précise t-il pas que, tout associé a le droit de participer aux décisions collectives.

En définitive on peut retenir que ces deux critères sont étroitement liés de sorte que l’apport modèle le droit d’intervention.

L’apport fournit la mesure du droit d’intervention en raison de l’application de la loi de la majorité, c’est ainsi que l’intervention d’un associé majoritaire aura plus de poids que celle d’un minoritaire.

En revanche, le droit d’intervention réfléchit sur l’apport, c’est ainsi qu’un droit d’intervention renforcé est de nature à conférer plus de valeur à un apport.


DE LA SUSPENSION DES POURSUITES INDIVIDUELLES DANS LA PROCEDURE DE REGLEMENT PREVENTIF DE L’OHADA : le sort de la caution

(Notes à propos de l’Ordonnance N° 135/08 du 06 mars 2008 portant suspension des poursuites individuelles, rendu par le Président du Tribunal de Commerce de Bamako)

Le règlement préventif, tel qu’il est prévu à l’article 2 de l’Acte Uniforme de l’OHADA, relatif aux Procédures Collectives, est une procédure destinée à éviter la cessation des paiements ou la cessation d’activité d’une entreprise et à permettre l’apurement de son passif au moyen d’un concordat préventif.

Cette procédure qui a été largement influencée par le droit français des entreprises en difficulté pourrait être rapprochée de la procédure de sauvegarde du droit français issue de la dernière réforme de 2005, en ce qu’elles tendent aux mêmes fins.

Le législateur de l’OHADA a, donc dans cette perspective, donné au Président de la juridiction concernée, un pouvoir lui permettant d’éviter la cessation des paiements du débiteur et de favoriser l’apurement de son passif.

Ce pouvoir consiste en la possibilité pour le Président de la juridiction concernée, d’ordonner la suspension des poursuites individuelles dès l’ouverture du règlement préventif tel qu’il ressort de l’article 8 de l’Acte Uniforme précité.

Une telle décision s’accompagne nécessairement de conséquences directes sur la situation de l’entreprise qui a demandé le bénéfice de la procédure (le débiteur principal), des créanciers et des cautions.

Sur la situation de l’entreprise en difficulté et des créanciers, cette décision suspend durant toute la procédure, l’ensemble des poursuites individuelles tendant à obtenir le paiement des créances spécifiquement désignées par le débiteur principal et nées antérieurement à la décision prononçant cette suspension.

Si la situation du débiteur principal et des créanciers ne semble pas poser de difficultés, demeure le sort de la caution.

La caution peut-elle, en sa qualité, bénéficier des effets de la suspension des poursuites individuelles ordonnée en faveur du débiteur ?

Au regard des dispositions de l’article 5 de l’Acte Uniforme précité, il est dit que seul le débiteur principal peut solliciter de la juridiction compétente, l’ouverture à son profit d’un règlement préventif.

Il en découle que la suspension des poursuites ordonnée, ne bénéficie qu’au débiteur principal, la caution ne pouvant nullement s’en prévaloir.

Par conséquent, rien n’empêche que la caution soit immédiatement poursuivie pour l’ensemble de la créance, nonobstant la suspension des poursuites individuelles.

Curieusement, une ordonnance portant suspension des poursuites individuelles rendue en date du 6 mars 2008 par le Président du Tribunal de Commerce de Bamako indique que : la « suspension concerne aussi bien les voies d’exécution, les mesures conservatoires que l’exécution, la mise en œuvre et la réalisation de toutes les garanties consenties au profit … (du débiteur principal) »

Dans une telle situation, dès avant la formation du concordat préventif, aucune garantie apportée par la caution ne peut être réalisée pour assurer le remboursement des crédits octroyés au débiteur principal.

En l’espèce, une banque avait octroyé des crédits à une société pour lui permettre de faire face à ses activités. L’ensemble de ces crédits avait été garantie par l’un des dirigeants de la société qui s’était porté caution et avait donné en hypothèque plusieurs de ses biens immobiliers.

Traversant une situation financière difficile et craignant une cessation des paiements, cette société a demandé au Président du Tribunal de Commerce de Bamako, le bénéfice d’une suspension des poursuites individuelles devant permettre la mise en place d’un concordat préventif.

Le Président de la juridiction concerné a fait droit à cette demande.

Cependant, il a étendu par la même occasion sa décision suspendant les poursuites individuelles à l’exécution, la mise en œuvre et la réalisation de toutes les garanties consenties au profit de la société en difficulté.

En décidant ainsi, le Président de la juridiction concernée protège la caution en lui permettant de bénéficier (hors tout support juridique) de l’ordonnance de suspension des poursuites individuelles.

Il nous semble important de rappeler que, s’il est impératif d’éviter la cessation des paiements du débiteur principal et de permettre l’apurement de son passif, toutes décisions qui viendraient à remettre en cause le fondement des garanties et la protection qu’offre les sûretés, ne pourraient être que source d’insécurité juridique dans un contexte africain déjà largement décrié par les investisseurs et les opérateurs économiques.

Le Président de la juridiction concernée a cru pouvoir, au nom de la sauvegarde et du renflouement de l’entreprise en difficulté, faire échapper la caution de ses obligations, mais c’était sans compter avec la procédure de l’appel nullité.

En effet, même si d’après les dispositions de l’article 22 de l’Acte Uniforme précité, la décision de suspension des poursuites individuelles, prise par le Président du Tribunal de Commerce de Bamako n’est susceptible d’aucune voie de recours, une jurisprudence française constante et bien établie permet de faire un appel nullité pour suppléer le caractère limitatif des voies de recours prévues par la loi. (Vr Cass. Com 12 mai 1992 ; Dalloz 1992, Jur. P 345 note G. BOLARD / Cass. Com, 2 mai 2001 ; Bull n° 83, N° 98-11-329 / Cass. Com, 27 mai 2003, n° 891 FS-P
Vr aussi P. CAGNOLI, « Essai d’analyse processuelle du droit des entreprises en difficulté » ; LGDJ 2002, n° 501 et suivants)

En interdisant ainsi l’exécution, la mise en œuvre et la réalisation de toutes les garanties consenties au profit du débiteur principal, le Président du Tribunal de Commerce de Bamako a largement outrepassé ses attributions telles qu’elles ressortent des articles 5, 6, 7, 8 et 9 de l’Acte Uniforme de l’OHADA, relatif aux Procédures Collectives.

Les dispositions de l’article 22 n’excluraient donc pas le jeu de l’appel nullité selon le droit processuel en cas d’excès de pouvoir du Président de la juridiction compétente.

D’ailleurs, il y a lieu de préciser que les dispositions de l’alinéa 3 de l’article 18 de l’Acte Uniforme précité excluent expressément la caution du débiteur, du bénéfice du concordat préventif en ces termes, « les cautions et coobligés du débiteur ne peuvent se prévaloir des délais et remises du concordat préventif ».

Le législateur de l’OHADA n’a jamais voulu faire bénéficier à la caution les mesures destinées au renflouement du débiteur principal.

Il faut alors comprendre que dans l’hypothèse d’une procédure d’exécution forcée, la caution n’a pas la possibilité d’évoquer les avantages consentis au débiteur principal par les créanciers dans le cadre du concordat préventif.

La suspension des poursuites individuelles dans le règlement préventif de l’OHADA devrait donc être sans effet sur la situation de la caution personnelle du débiteur principal, sauf à ce que, comme en l’espèce, le Président de la juridiction compétente étende la décision de suspension des poursuites à la réalisation de toutes les garanties consenties au profit du débiteur principal.
Banquiers et autres organismes prêteurs, prenez garde lors de l’octroi de crédit aux entreprises, car désormais, il vous sera impossible de réaliser votre garantie en cas de règlement préventif même avec une caution personnelle du dirigeant social.

En revanche, un appel nullité serait toujours envisageable.

Dans de telles conditions, on est néanmoins en droit de se poser la question de savoir si les sûretés protègent encore les intérêts des créanciers.

QUELQUES PRECISIONS SUR LA NOTION DE CESSATION DES PAIEMENTS DANS L’OHADA

La cessation des paiements est la condition d’ouverture des procédures de redressement judiciaire et de liquidation des biens dans l’espace OHADA.

La déclaration de cet état est non seulement un acte de sauvegarde de l’entreprise pour éviter qu’elle ne continue à creuser son passif, mais aussi une obligation légale qui expose le dirigeant à des sanctions.

Le législateur de l’OHADA et la jurisprudence utilisent la notion de cessation des paiements pour fixer la date à partir de laquelle les dirigeants ont l’obligation de déposer le bilan, les créanciers la possibilité d’assigner pour déclencher une procédure collective et le Président du Tribunal de commerce la possibilité de se saisir d’office.

Le défaut ou le retard dans la déclaration de la cessation des paiements engendre un risque important pour le dirigeant social qui peut subir lui-même un redressement judiciaire ou une liquidation pour poursuite abusive de son activité ou une sanction d’interdiction de gérer voir de faillite personnelle.

Mais quand est-on en situation de cessation des paiements ?

Aux termes de l’article 25 de l’Acte Uniforme relatif aux procédures collectives d’apurement du passif, le bénéfice du redressement judiciaire ou de la liquidation des biens est accordé à tout débiteur qui est dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible.

C’est donc une notion comptable qui est retenue par le législateur et qu’applique la jurisprudence.
(TGI Ouagadougou, n° 192, 24-2-1999 : Requête de la B.C.T.I aux fins de redressement judiciaire, www.ohada.com, Ohadata J-04-178 / TGI Banfora, n° 02, 31-1-2003 : Les Grands Moulins du Burkina (G.M.B), www.ohada.com, Ohadata J-04-51 ; voir Ohadata J-04-61 / TRHCD 27-8-2001, Ministère public et Sté TOUTELECTRIC c/ Pape Aly GUEYE, www.ohada.com, Ohadata-J-03-101)

Or, de nombreuses interprétations de bon sens permettent de moduler cette approche.

La cessation des paiements ne suppose pas que l’entreprise se trouve dans une situation complètement obérée et sans issue.

Au contraire, elle peut correspondre à des difficultés passagères mais tout de même plus accentuées qu’une gêne momentanée de trésorerie.

Sont classiquement concernées, les situations dans lesquelles, les entreprises ne font pas face à leurs échéances mensuelles commerciales, sociales ou fiscales et n’ont pas établi un ré-étalement contractuel de leurs dettes, sans pour autant être dans une situation irrémédiablement compromise.

Une entreprise qui a des difficultés mais qui est dans l’attente d’un règlement important ou d’un contrat significatif peut valablement considérer qu’elle n’est pas en situation de cessation des paiements.

Aussi, la perspective de vente d’un actif important (usine, terrain, filiale) avec des négociations sérieusement engagées et proches d’aboutir, peut justifier le report d’une décision de déclaration de cessation des paiements.

Alors qu’une situation financière qui se dégrade, des impayés récurrents, un marché en régression sans perspective d’amélioration et un environnement politico-économique instable peuvent justifier une déclaration de cessation des paiements même si actif et passif s’équilibre encore.

La notion de cessation des paiements ne devrait pas se résumer à une simple question de comptabilité, elle doit se comprendre comme un concept juridique et commercial, en se distinguant de l’insolvabilité et se rapprochant plus de la notion de non-liquidité.

Elle ne doit pas se confondre avec l’insolvabilité. Une entreprise peut être parfaitement solvable compte tenu de ses éléments d’actifs et pourtant ne pas être en mesure, faute d’une trésorerie suffisante, de payer ses dettes à leur échéance faute d’actif disponible.

Il a été d’ailleurs décidé par le TGI de Ouagadougou, que l’importance de l’actif immobilier d’une société ne signifiait pas qu’elle n’était pas en cessation des paiements.

L’état de cessation des paiements est établi lorsque le débiteur est hors d’état de faire face au passif exigible avec l’actif disponible, sans qu’il y ait lieu de prendre en considération les éléments d’actifs constitués d’immobilisations. (TGI Ouagadougou, n° 45, 18-2-2004 : KABORE Henriette (BTM), BATEC-SARL & Entreprise DAR-ES-Salam c/ SOSACO, www.ohada.com, Ohadata J-04-374, voir Ohadata J-04-375)

La cessation des paiements est la traduction d’une insuffisance de disponibilités, c’est-à-dire d’une crise de trésorerie, ou encore de l’impossibilité de se procurer cette trésorerie.

La trésorerie joue un rôle capital dans l’appréciation de l’actif disponible. L’élément fondamental et décisif de l’actif disponible est la réserve de trésorerie dont peut immédiatement disposer l’entreprise notamment du fait des délais de paiement couramment accordés par les fournisseurs.

Le TGI de Ouagadougou avait décidé à ce propos, que la cessation des paiements d’une société découle de la suspension du contrat des travailleurs, du gel des activités, des dettes très élevées alors que l’actif se trouve très immobilisé dans des projets non encore productifs. (TGI Ouagadougou, n° 389, 17-9-2003 : Requête de la Société sahel compagnie (SOSACO) aux fins de liquidation des biens, www.ohada.com, Ohadata J-05-218 ; voir aussi Ohadata J-04-140, Ohadata J-04-145 et Ohadata J-04-146)

Cependant, une insuffisance de trésoreries ne suffit pas à traduire toutes les situations de cessation des paiements notamment lorsque l’insuffisance d’actif est importante en l’absence de nouveaux capitaux permanents.

La dégradation constante de la trésorerie du débiteur et son manque de capitaux propres ne devraient pas suffire à eux seuls pour caractériser la cessation des paiements.

De même, l’absence d’actif disponible ne résulte pas du seul manque de capitaux propres et de la dégradation constante de la trésorerie. (Voir par exemple en droit français, Cass. com. 20-5-1997 : RJDA 10/97 n° 1257)

Dans la réalité financière, une entreprise est solvable si elle est capable de faire face à ses engagements en réalisant, si besoin est, des ventes d’actifs.

Deux critères doivent alors être pris en considération:

- La solvabilité sur la base d’une valeur de cession des biens de l’entreprise, ainsi les valeurs comptables devront être revues dans une optique de la vente de tout ou partie des biens de l’entreprise.
- La liquidité liée aux ressources propres de l’entreprise (essentiellement sa capacité d’autofinancement) et à des concours financiers éventuels.

Quelle qu’en soit la cause, la situation de cessation des paiements doit se traduire matériellement par l’installation d’une situation financière désespérée de l’entreprise, caractérisé par le non-paiement d’une ou de plusieurs créances certaines, liquides et exigibles.

Cependant, on peut considérer que dispose d’un actif disponible le débiteur qui peut régler ses dettes s’il trouve encore à emprunter, ce que, sauf recours à des moyens frauduleux, on ne saurait lui reprocher. L’entreprise sera alors en cessation des paiements dès lors qu’elle ne dispose plus d’aucune réserve de crédit.

Il est important de bien déterminer la date de cessation des paiements. A partir de cette date, on détermine la période passée, antérieure à la déclaration et sur laquelle l’administrateur judiciaire pourra examiner toutes les opérations pour les remettre en question (c’est la période dite suspecte).

Cette date détermine aussi le cas répréhensible de déclaration tardive, dans lequel le dirigeant a volontairement poursuivi une activité compromise en aggravant son passif.

Si cette déclaration tardive s’est doublée d’abus du dirigeant (abus de biens sociaux, salaire surévalué, vente d’actifs importants, transfert d’actifs vers d’autres sociétés dans lesquelles il a des intérêts…), le Tribunal pourra décider de sa responsabilité et lui réclamer un comblement de passif sur ses biens propres.

La notion de cessation de paiement sert donc à la fois de critère pour déterminer les conditions du dépôt de bilan dans le cadre de l’ouverture des procédures, mais aussi la responsabilité des dirigeants et les sanctions pouvant être prononcés à leur égard.

Il ne s’agit donc pas d’une simple notion comptable, la comparaison des éléments du bilan n’étant pas de nature à établir l’existence de la cessation des paiements.

C’est une notion très particulière qui ne saurait être assimilée à une « situation irrémédiablement compromise » comme l’exigeait autrefois les Tribunaux français, ni au « surendettement » du droit allemand supposant que l’actif ne couvre pas le passif, déduction faite des fonds propres (Voir sur les éléments de comparaison, M. IHLE « Les procédures collectives en république fédérale d’Allemagne » ; Rev. Banque, n° spéc., La banque et l’entreprise en difficulté, Vol I. 11 / F. TROCKELS « Aperçu du nouveau régime de l’insolvabilité en Allemagne» Rev. Proc. Coll 1996. 23)
, ni même encore à l’insolvabilité qui reste un état où l’actif est inférieur au passif, ce qui entraîne une impossibilité durable de règlement des dettes.

De toutes les façons, plusieurs entreprises resplendissantes de santé aujourd’hui, se sont trouvées à un moment de leur existence dans une situation pouvant apparaître irrémédiablement compromise. (Voir sur la problématique, Valérie AVENA-ROBARDET « situation irrémédiablement compromise et cessation des paiements : Deux notions à ne pas confondre » ; note sous Cass Com 31 mars 2004, D 2004 Jp. 1231)

La notion retenue aujourd’hui par la jurisprudence semble conforme à la logique du législateur qui veut traiter les défaillances des entreprises ayant encore des chances de redressement, même si on peut constater que le critère retenu conduit à ouvrir la procédure lorsqu’il y a déjà un signe net de défaillance. (Voir sur l’évolution de la notion, V. MARTINEAU-BOURGNINAUD « la cessation des paiements, notion fonctionnelle » ; R.T.D Com 2002. 245)

DIX QUESTIONS PRATIQUES SUR LE FONCTIONNEMENT DES SOCIETES COMMERCIALES DE L’OHADA

1- Un commissaire aux comptes peut-il démissionner ?

A la lecture de l’Acte Uniforme relatives aux sociétés commerciales, aucune disposition ne s’oppose à la démission du commissaire aux comptes.

Ce dernier peut démissionner quel qu’en soit le motif et la forme. Il importe cependant qu’il le fasse à bon escient. Toute démission abusive et intempestive qui provoquerait un dommage à la société l’exposerait à une demande en réparation.

2- Faut-il l’agrément des associés quand il y a succession d’un associé ?

Dans les SA, nonobstant le principe de la libre transmissibilité posé par l’article 764 de l’Acte Uniforme, les statuts peuvent prévoir certaine limitations. Cependant, ces limitations ne peuvent s’opérer en cas de succession. La clause d’agrément à l’égard des héritiers est donc illicite (article 765 – 3°).

En revanche, dans les SARL, l’Acte Uniforme précise qu’en cas décès d’un associé, les statuts peuvent prévoir que son héritier ou son successeur ne deviendra associé qu’après avoir été agréé dans les conditions qu’ils fixent (article 321).

Quant à la SNC, si les statuts prévoient non seulement la continuation de la société en cas de décès de l’un des associés mais aussi la continuation avec les héritiers, ces derniers doivent être agréés à l’unanimité des associés survivants.

3- Une société peut-elle se porter caution d’une autre société ?

En principe, une personne morale peut se porter caution des dettes d’une autre personne morale. Le cautionnement est alors dans ce cas soumis à une juxtaposition des règles du droit commerciale et du droit civil.

Cependant, dans la pratique, il faut distinguer selon le type sociétaire. Dans la SA par exemple, les cautions souscrites par la société pour des engagements pris par des tiers doivent faire l’objet d’une autorisation préalable du conseil d’administration (article 449).

4- Un administrateur peut-il contracter à des fins personnelles un emprunt auprès de sa société ?

En principe, un administrateur ne peut pas contracter un emprunt auprès de sa société sous quelque forme que ce soit (article 450).

En revanche, cette interdiction ne s’applique pas aux personnes morales membres du conseil d’administration. Il est alors dans ce cas appliquées à l’opération les dispositions propres aux conventions réglementées prévues aux articles 438 à 448.

5- Un associé peut-il emprunter en son nom pour le compte de la société ?

Si une telle opération est concevable légalement, il faut toutefois remarquer qu’elle n’aura d’effet qu’entre l’associé et le prêteur.

Dans la pratique, il revient à l’associé de mettre les fonds à la disposition de la société sous la forme qui lui convient : apport, compte courant, etc.

6- Une SARL doit-elle recourir à un commissaire aux apports en cas d’augmentation du capital en nature

En cas d’augmentation de capital par des apports en nature, un commissaire aux apports doit être désigné par les associés dès lors que la valeur de l’apport est supérieure à cinq millions (5. 000 000) de francs CFA.

Ce commissaire aux apports peut également être nommé par le président de la juridiction compétente à la demande de tout associé, peu important le nombre de parts qu’il représente (article 363).

7- Quelle est la limite de la participation réciproque directe entre les sociétés ?

Une SA ou une SARL ne peut posséder d’actions ou de parts sociales d’une autre société si celle-ci détient une fraction de son capital supérieure à 10% (article 177).

En revanche si une société autre qu’une SA ou une SARL a, parmi ses associés, une SA ou une SARL détenant une participation à son capital supérieure à 10%, elle ne peut détenir d’actions ou de parts de cette société.

8- Dans quel délai peut-il y avoir autorisation tacite de cession de parts sociales dans une SARL ?

L’Acte Uniforme prévoit à l’article 317, une procédure particulière pour les cessions de parts de SARL au cours de laquelle de multiples formalités de notification doivent être respectées préalablement à l’autorisation de cession.

L’autorisation tacite de cession n’est acquise que passé un délai de 3 mois à compter de la dernière notification prévue à l’alinéa 2 de l’article 319.

9- Quelles sont les conséquences du non-respect des dispositions régissant l’ordre du jour des AG dans les SA ?

Il est de principe que l’assemblée générale ne délibère que sur les questions inscrites à l’ordre du jour (article 522) faute de quoi l’assemblée est réputée nulle de plein droit.

Or, elle peut délibérer valablement sur la révocation des membres du conseil d’administration ou le cas échéant de l’administrateur général et procéder à leur remplacement sans que cette question ait été portée à l’ordre du jour.

10- Une SARL, filiale d’une autre société, peut-elle consentir des prêts ou des avances à sa société mère ?

L’article 356 fait interdiction aux gérants et associés de SARL de contracter des emprunts auprès de la société, de se faire consentir des découverts par elle ou de lui faire cautionner des engagements souscrits par eux à l’égard des tiers.

Les actes passés en contravention de cette disposition sont frappés de nullité absolue.

Cependant, cette interdiction ne s’applique qu’aux associés personnes physiques de la SARL, de sorte que cette règle n’empêche pas les opérations de trésorerie au sein d’un groupe de sociétés auquel participe la SARL.

Cette faculté s’accompagne des précautions posées par la procédure dite des conventions réglementées (articles 350 à 355), puisque ces conventions relèvent rarement d’opérations courantes conclues à des conditions normales.

Dans la pratique, une avance, un prêt consentis à la société mère seront soumis à un contrôle à posteriori exercé par la collectivité des associés (sauf ceux ayant conclu la convention) sur rapport du gérant de la SARL ou du commissaire aux comptes.

ENFIN, L'AFRIQUE SUBSAHARIENNE SUR LA VOIE DE LA SECURISATION JURIDIQUE ET JUDICIAIRE DES ACTIVITES ECONOMIQUES: Il a fallu du temps

Face à l'universalisation des marchés et à la libéralisation des échanges, les pays africains n'ont pas vraiment eu le choix dans la négociation de cette mutation socio-économique.

Soit ils avançaient en rang disperser et subissaient les foudres de l'économie de marché et de la mondialisation, soit ils acceptaient de s'adapter en se regroupant pour former de grands ensembles dans l'espoir de rester dans la course.

Pour la plupart de ces pays, il fallait sans plus tarder, promouvoir la coopération et l'intégration économique régionale pour avoir une place dans un monde où on assiste de plus en plus à des regroupements de pays dans l'optique de créer des unions commerciale, monétaire et / ou économique.

C'est cette volonté de coopération qui a conduit les Etats africains depuis quelques années à se regrouper pour défendre les intérêts qui leurs sont communs.

Plusieurs regroupements géographiques ont ainsi être créés, parmi lesquels on peut mentionner: la CEPGL (Communauté Economique des Pays du Grand Lac), l'UDEAC (Union Douanière des Etats de l'Afrique Centrale) devenue la CEMAC (Communauté Economique et Monétaire des Etats d'Afrique Centrale), l'UEMOA (Union Economique et Monétaire Ouest Africaine), la BAD (Banque Africaine de Développement), la BEAC (Banque Centrale des Etats de l'Afrique Centrale), la COBAC (COmmission Bancaire de l'Afrique Centrale), la BCEAO (Banque centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest) et la BVRM (Bourse Régionale des Valeurs Mobilières), pour ne citer que ceux-là.

Mais cette volonté de coopération ne s'est pas arrêtée là. Un début d'intégration juridique a aussi vu le jour avec une harmonisation des législations sociales à travers la convention générale de sécurité sociale de l'OCAM (Organisation Commune Africaine et Malgache) et de la CIPRES (Conférence Interafricaine de PREvoyance Sociale), avec la création en matière d'assurance de la CIMA (Conférence Interafricaine sur les Marchés de l'Assurance) et la mise en place en matière de propriété intellectuelle de l'OAPI (Organisation de la Propriété Intellectuelle en Afrique).

Malgré tout ces efforts de regroupement, la situation économique des pays africains ne s'est pour autant pas améliorée et est restée assez préoccupante d'autant plus qu'on assiste depuis quelques décennies à un ralentissement des investissements sur le continent. Les opérateurs économiques étrangers ou même nationaux et les investisseurs ne donnant plus leur confiance au système juridique et judiciaire en place.


La corruption de tout le système judiciaire, l'imprévisibilité des tribunaux, l'absence de publication des décisions de justice, des décisions judiciaires contestables, des décisions en délibérées depuis plusieurs années, l'accueil des moyens dilatoires, les renvois à répétition, la lenteur des procédures, les difficultés d'exécution des décisions de justice, des législations disparates, hétérogènes et contradictoires, l'inadaptation des législations à l'évolution des affaires, la saturation des tribunaux avec des moyens matériels limités, la faible rémunération et le manque de formation des magistrats et auxiliaires de justice, et la liste est loin d'être close, ont laissé s'installer sur le continent une réelle insécurité juridique et judiciaire empêchant toutes activités économiques sérieuses.

Or, pour réussir une bonne intégration économique et encourager l'investissement, il fallait une législation répondant aux attentes des opérateurs économiques et des instruments juridiques à la hauteur de leurs ambitions.

Voilà les conditions dans lesquelles, les Etats africains, du moins francophones pour un grand nombre d'entre eux, ont créé le 17 octobre 1993 à Port-Louis (Ile Maurice) l'OHADA (Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires), entrée en vigueur depuis janvier 1998.

Cette organisation qui regroupe aujourd'hui plusieurs Etats africains (Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Comores, Congo, Côte d'Ivoire, Gabon, Guinée, Guinée Bissau, Guinée Equatoriale, Mali, Niger, Sénégal, Tchad, Togo, RDC en cours d'adhésion) est sans doute l'une des plus importante sur le continent en matière d'intégration juridique et judiciaire.

Ses objectifs sont clairement précisés lorsqu'il s'agit de favoriser l'institution d'une communauté économique africaine, de promouvoir l'unité africaine afin de développer l'activité économique et de garantir la sécurité juridique et judiciaire au sein de la communauté.

Mais comment cette organisation compte-t-elle garantir cette sécurité aux activités économiques?

Pour obtenir cette sécurisation des activités économiques, l'OHADA a élaboré des instruments et mécanismes aptes à atteindre les objectifs qu'elle s'est fixée.

Pour garantir la sécurité juridique, l'OHADA a mis sur pieds un système qui porte déjà ses fruits et qui est axé essentiellement sur des organes chargés de veiller au bon fonctionnement juridique dans l'espace communautaire.

Tout d'abord, le Conseil des Ministres des Etats membres, chef d'orchestre de cette sécurité juridique, joue un rôle prépondérant dans l'élaboration des solutions à la problématique de la disparité des normes juridiques en matière de droit des activités économiques dans les différents Etats. Composé des membres de l'exécutif des pays concernés, cet organe a compétence pour agir dans la sphère législative en lieu et place des parlements nationaux. Mais il ne s'agit point d'un parlement communautaire à l'instar de l'union Européenne.

Ensuite, le Secrétariat permanant situé à Yaoundé (Cameroun) qui, rattaché au
Conseil des Ministres, est chargé de la préparation des Actes Uniformes en concertation avec les gouvernements des Etats-parties, de la coordination des activités et du suivi des travaux de l'organisation. Cet organe prépare le programme annuel d'harmonisation du droit des activités économiques et se charge de la publication dans le Journal Officiel de l'OHADA.

Enfin, pour encourager l'initiative économique et la fiabilité des normes juridiques des Etats membres, l'organisation par le truchement du Conseil des Ministres a élaboré un corps de règles communes qualifié d'« Actes Uniformes ».

Le Traité communautaire va ainsi régir, les règles relatives au droit des société et au droit commercial général, au recouvrement des créances, aux sûretés et aux voies d'exécution, au régime du redressement des entreprises et de la liquidation des biens, au droit de l'arbitrage, au droit comptable, au droit de la vente et des transports et certainement sous peu, au droit social et à la mise en place d'un cadre légal unifié des Télécommunications. L'objectif de ces différents textes reste la modernisation du système juridique qui passe par la rénovation du statut des entreprises, le renforcement des gages des créanciers et la mise en place de solutions adaptées aux entreprises en difficulté.

Quant à l'insécurité judiciaire, l'OHADA a créé deux institutions importantes devant permettre à moyen ou long terme d'y remédier efficacement.

D'une part, la mise en place d'une Ecole Régionale Supérieure de Magistrature située à Porto-Novo (Bénin), qui a pour but de former des magistrats et un personnel judiciaire capable de comprendre et d'appliquer le droit unifié. Cette institution joue un rôle non négligeable en ce qu'elle permet aux magistrats des Etats membres d'avoir une formation uniforme et d'acquérir ainsi une compétence homogène en droit des affaires. Le rôle de cette formation dans la lutte contre l'insécurité n'est plus à démontrer, tant elle répond aux attentes des protagonistes de l'activité économique sur le continent.

D'autre part, on ne peut manquer de souligner la création d'une structure très originale, qui est la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage situé à Abidjan (Côte d'Ivoire). Organe juridictionnel, supranational et d'arbitrage de la communauté, il a compétence pour connaître du contentieux sur les Actes Uniformes, sur l'interprétation et l'application du Traité et de ses règlements d'application. Il peut être saisi pour une demande d'avis, un pourvoi en cassation, une exception d'incompétence, une décision d'exéquatur, ou encore la nomination d'arbitre.

Voilà pour l'essentiel, les mécanismes et moyens mis en œuvre par les pays de la zone OHADA pour garantir la sécurité des activités économiques et rétablir la confiance des investisseurs à une époque où bon nombre de délocalisations se font au bénéfice du continent asiatique.

Il a fallu du temps, pour que ces différents mécanismes s'emboîtent entre-eux et que la machine soit aujourd'hui bien rodée.

A la question peut-on investir en sécurité de nos jours en Afrique, la réponse est oui, même si quelques réticences subsistent quant à l'instabilité politique dans certains pays.

On ne peut que souhaiter d'une part, que les autres pays africains rejoignent l'OHADA dans sa démarche et d'autre part, que les dirigeants africains passent de la simple volonté politique à une véritable motivation politique pour que cette sécurisation des activités économiques soit effective et définitive.

QUI REPRESENTE LA SOCIETE EN LIQUIDATION DES BIENS DANS L’ESPACE OHADA?

La liquidation des biens est une procédure collective, régie par l’Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif, qui consiste en la saisie collective des biens du débiteur en état de cessation des paiements, qui seront réalisés en vue du paiement de ses créanciers placés sur un pied d’égalité.

En vertu de l’article 33 de l’Acte Uniforme, la liquidation des biens peut être ouverte soit immédiatement lorsque l’entreprise n’a pas d’espoir de se redresser, le débiteur n’ayant pas proposé un concordat sérieux ou qu’elle a cessé toute activité, soit à l’issue d’une période d’observation.

Dès le prononcé du jugement d’ouverture de liquidation des biens, le Tribunal nomme les organes de la procédure, notamment le mandataire à la liquidation ès qualité de liquidateur des biens, fonction exercée par le syndic.

Ce syndic est chargé de prendre en main toutes les opérations de réalisation de l’actif et d’apurement du passif, afin de désintéresser un maximum de créanciers. Il s’occupe entre autre de la gestion de l’entreprise défaillante pendant toute la durée de la liquidation.

En effet, les alinéas 2 et 3 de l’article 53 de l’Acte Uniforme énonce que le jugement qui prononce la liquidation des biens entraîne corrélativement le dessaisissement des pouvoirs du débiteur au profit du syndic qui sera chargé de représenter les droits et actions concernant le patrimoine du débiteur dessaisi pendant toute la durée de la procédure collective.

Lorsque le débiteur est une personne physique, l’application de cet article ne pose pas de difficulté dans la mesure où le débiteur est simplement remplacé par le syndic, chargé de le représenter dans ses droits et actions concernant son patrimoine. En revanche, ce dernier conserve ses droits propres, tels que les droits de recours contre les décisions, qu’il pourra exercer lui-même.

Or, lorsque le débiteur est une personne morale, le problème est tout autre. En effet, il convient de faire une application combinée des articles 53 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif et 200 – 6° de l’Acte Uniforme relative aux sociétés commerciales, prévoyant la dissolution de plein droit de la société en cas de liquidation des biens.

La société débitrice dissoute est donc dessaisie et à travers elle, les dirigeants sociaux, le conseil d’administration ou, le cas échéant l’administrateur générale.

Cependant, en vertu de l’alinéa 3 de l’article 201 de l’Acte Uniforme relative aux sociétés commerciales, la personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation jusqu’à la clôture de celle-ci et aussi longtemps que les droits et obligations à caractère social ne sont pas liquidés.

La société dispose encore de droits propres, notamment le droit de faire appel du jugement ouvrant ou prononçant la liquidation des biens, ou faire appel des décisions du juge commissaire.

Toute la problématique est alors celle de savoir qui est habilité à représenter la société dans ces diverses actions.

Comment pallier ce vide législatif occasionné par la cessation des pouvoirs des dirigeants sociaux dès le prononcé du jugement de liquidation des biens contre la personne morale ?

Pour tenter d’apporter une solution à cette problématique à mi-chemin entre le droit des sociétés et le droit des procédures collectives, il faudrait concilier les deux matières.

Il semble indispensable de remplacer les organes sociaux dessaisis et de nommer aux côtés du syndic qui est l’organe chargé de la procédure de liquidation des biens (I), un représentant de la société qui sera chargé de représenter les intérêts propres de la société débitrice (II).


I- LES EFFETS DE LA PROCEDURE DE LIQUIDATION DES BIENS SUR LA SOCIETE DEBITRICE: Le dessaisissement des organes sociaux

La liquidation des biens de la personne morale a pour conséquence immédiate la cessation des fonctions des organes sociaux qu’il serait impératif de remplacer pour combler l’absence de représentant de la société.

Du fait de la perte de leur mandat, les organes sociaux deviennent incompétents pour représenter la société en liquidation des biens qui se retrouve sans représentant pour exercer ses droits propres et défendre ses intérêts.

Comme nous l’avons déjà souligné précédemment, la cessation des pouvoirs des organes sociaux découle de la dissolution de plein droit de la société en liquidation des biens.

La société débitrice est dissoute par l’effet d’un jugement prononçant la liquidation des biens et la personnalité morale doit subsister pour les besoins de la liquidation.

Par conséquent, la société étant dissoute de plein droit, ses organes sociaux perdent leur pouvoir de gestion et la capacité de la représenter en justice pour la défense de ses droits propres.

C’est le syndic qui assure la gestion du patrimoine social et exerce les droits et actions qui y sont attachés. Il est donc incompétent pour exercer les droits propres de la débitrice et ne représente pas celle-ci dans les actions en justice qu’il peut engager au sens des règles de procédure sur la représentation.

Etant chargé de représenter les créanciers, on pourrait se retrouver très vite face à un conflit d’intérêts entre les droits des créanciers et ceux propres à la débitrice, s’il était chargé d’agir en lieu et place de la débitrice pour ses droits n’entrant pas dans son patrimoine.

Les organes sociaux sont eux aussi incompétents pour représenter la débitrice puisqu’ils ont perdu tous pouvoirs dès le prononcé du jugement prononçant la liquidation des biens.

La jurisprudence française estime d’ailleurs que le dirigeant social ne peut exercer aucune voie de recours si la société est en liquidation judiciaire, puisqu’elle est dissoute et le mandat des dirigeants sociaux de la personne morale débitrice a pris fin.

Dans de telles conditions, qui représente la société débitrice dans ses droits et actions, notamment quant à l’appel du jugement ouvrant ou prononçant la liquidation des biens, sachant que le délai pour exercer l’action est de 15 jours ?

En effet, dans le cadre du droit des sociétés et hors toute procédure collective, lorsque la dissolution de la société a lieu pour toute autre cause, les pouvoirs des dirigeants sont transférés à un liquidateur désigné par les associés ou par décision de justice.

Il revient à ce liquidateur de représenter la société puisqu’il est investi des pouvoirs les plus étendus pour réaliser l’actif, même s’il ne peut continuer les affaires en cours ou en engager de nouvelles que s’il y a été autorisé par décision de justice.

Cette solution est-elle transposable dans le cadre d’une procédure collective ?

En cas de liquidation des biens dans le cadre d’une procédure collective, la présence du syndic fait-elle obstacle à la désignation de ce liquidateur ?

La seule certitude qu’on puisse avoir à ce stade du raisonnement est qu’il est impératif de remplacer les organes sociaux dessaisi pour pallier l’absence de représentant de la société débitrice.

Il est indispensable de prendre en compte les intérêts de la société débitrice et d’assurer la relève de l’organe de gestion et de représentation.

En droit français, la Cour de cassation avait décidé que « si le débiteur est recevable à former un recours, il ne peut, s’agissant d’une personne morale dissoute (…), et dont le dirigeant est privé de ses pouvoirs à compter de la liquidation judiciaire, exercer ce droit que par l’intermédiaire de son liquidateur amiable ou d’un mandataire ad hoc ».

Le Professeur SOINNE constatait déjà qu’en cas de liquidation judiciaire, « dans la pratique quasi-générale, il n’est désigné aucun liquidateur au sens du droit des sociétés de sortes que pour l’exercice de ses droits propres la personne morales n’est plus effectivement représentée ».

C’est à partir de là que se créent des remous au confluent du droit des sociétés et du droit des procédures collectives.

Devraient ainsi cohabiter le liquidateur « sociétaire », nouvel organe social, et le syndic, organe de la procédure collective.

La nomination d’un liquidateur « sociétaire » ne serait pas incompatible avec celle du syndic. Au contraire, elle serait même nécessaire pour la représentation en justice de la société débitrice.

Le liquidateur « sociétaire » serait donc l’organe chargé de représenter la société, à défaut de représentation par ses dirigeants sociaux. Il pourra intenter les recours contre la décision de liquidation ou celle fixant la date de cessation des paiements et serait dès lors compatible avec le syndic.

Ce liquidateur « sociétaire » encore appelé, liquidateurs statutaire, ad hoc, de droit commun, spécifique ou amiable serait ainsi chargé de défendre les droits propres de la société. Son choix serait libre et il pourrait aussi bien s’agir d’un amateur, tel un ancien dirigeant, que d’un professionnel, comme un ancien syndic.

Quant à sa nomination, on pourrait imaginer qu’il revienne au syndic de convoquer et présider l’assemblée générale des associés qui en décidera.

Cependant, dans la pratique, un problème risque de se poser. En effet, comme nous l’avons précisé précédemment, l’article 221 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives impose un délai de 15 jours pour faire appel des décisions rendues en matière de liquidation des biens.

Or, il sera difficile, voir impossible de pouvoir réunir les associés et nommer le liquidateur « sociétaire » dans de si brefs délais. Cette difficulté laisse alors penser que la désignation du liquidateur « sociétaire » relève plutôt de l’utopie.

Faute d’intervention des organes de la procédure, il faudrait sans doute se reporter aux dispositions régissant le droit des sociétés commerciales, notamment à l’article 208 de l’Acte Uniforme, permettant une désignation par les associés ou par décision de justice à la demande de tout intéressé.

On peut toutefois s’interroger sur le fait de savoir si personne n’agit, qui représentera la société ?

L’article 226 de l’Acte Uniforme relatif au droit des sociétés commerciales répond à cette interrogation. En effet, il prévoit que la décision de justice qui ordonne la liquidation de la société doit désigner un ou plusieurs liquidateurs.

Les parties qui saisissent le juge doivent donc solliciter entre autre la désignation d’un liquidateur « sociétaire » et ne pas oublier que le juge ne statue que sur les demandes qui lui sont faites. Si personne ne le saisit pour qu’il en nomme un, pour quelles raisons devrait-il le faire ?

D’ailleurs il ne pourrait en être autrement, surtout que les magistrats estimeront que s’ils nomment eux-mêmes un liquidateur « sociétaire », cela laisserait supposer qu’il prononce la dissolution de la société alors que celle-ci découle de plein droit du jugement de liquidation des biens.

Les acteurs à la procédure de liquidation des biens de la société débitrice disposent donc d’une possibilité leur permettant d’obtenir la désignation d’un liquidateur « sociétaire ».


II- MISSION DU LIQUIDATEUR SOCIETAIRE : Représenter les intérêts propres de la société débitrice

L’article 53 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives dispose que le dessaisissement du débiteur se fait au profit du syndic et c’est à lui seul de gérer les droits et actions du débiteur sur son patrimoine.

Comment s’opèrerait donc la délimitation des pouvoirs entre le syndic, organe de la procédure et le liquidateur « sociétaire », organe social ?

Si les deux organes doivent cohabiter, leurs pouvoirs respectifs doivent être bien délimités afin de faciliter la coordination de leurs différentes actions.

En effet, l’article 53 précité ne prévoyant pas un dessaisissement total de la débitrice, la mission du liquidateur « sociétaire » sera limitée aux pouvoirs non transférés au syndic.

Pour mieux apprécier les pouvoirs du liquidateur « sociétaire », il est alors judicieux de circonscrire les missions du syndic.

Le syndic se substitue aux organes de direction qui ont perdu leurs pouvoirs de gestion et de représentation.

Il procède aux opérations de liquidation, établit l’ordre des créances et assure la répartition du produit de la liquidation des biens. En tant qu’organe de la procédure, il détient les sommes appartenant à la société débitrice, qui lui sont remises dans l’exercice de son mandat. Il lui revient également de vérifier le passif, et de dresser un inventaire. C’est à lui de poursuivre toutes les instances introduites avant le jugement de liquidation par la débitrice.

Après avoir dressé un inventaire des actifs et du passif de la débitrice, il procède aux opérations de liquidation en transformant en liquidité les biens et les créances composant l’actif, afin de désintéresser les créanciers, sous le respect de l’ordre qui leur est attribué par la procédure collective.

Quant au liquidateur « sociétaire », sa mission serait alors de représenter la société débitrice dans ses droits propres, jusqu’à la clôture de la liquidation des biens.

Il se substitue ainsi aux organes sociaux déchus de leur pouvoir et peut exercer seul, dans l’intérêt propre de la débitrice, sans l’assistance d’un organe de la procédure, les voies de recours contre les décisions de justice.

Il devrait assister à la procédure de vérification des créances devant le juge commissaire et c’est à lui qu’il revient de faire appel des décisions prises par ce dernier, il peut par exemple contester une créance qui a été jugé admissible, ou dont le montant lui paraît trop élevé…

Il lui reviendrait aussi, d’accomplir les opérations de liquidation interne qui ne serait pas exclusivement de nature patrimoniale.

Sa mission prendrait fin avec la clôture de la procédure, qui peut être prononcée pour insuffisance d’actif ou pour extinction du passif.

Cependant, une nouvelle difficulté peut apparaître en pratique si les droits et obligations à caractère social n’ont pas encore été entièrement liquidés.

Tout comme en droit français, l’on devrait admettre que la personnalité morale subsiste aussi longtemps que les droits et obligations sociaux ne sont pas entièrement liquidés.

On se retrouve alors à nouveau face au problème de l’absence de représentant de la société débitrice.

Il serait de ce fait nécessaire de remplacer le liquidateur « sociétaire » dessaisi et de nommer à sa place un mandataire ad hoc, qui sera désigné par le juge.

Ce dernier devra être chargé de prendre en compte les intérêts de la société débitrice jusqu’à la liquidation complète des droits et obligations sociaux.







QUELQUES PRECISIONS SUR LE SORT DES ENGAGEMENTS DE LA CAUTION DECEDEE DANS L’OHADA

Les sûretés sont les moyens accordées au créancier par la loi ou la convention des parties pour garantir l’exécution des obligations.

Parmi ces sûretés, le cautionnement est celle qui reçoit de plus en plus la faveur des créanciers qui y trouvent une garantie peu complexe tant dans sa formation que ses modalités.

Pourtant, la combinaison du droit du cautionnement et du droit successoral peut parfois réserver de bien étranges surprises.

Le cautionnement est défini par l’Acte Uniforme portant organisation des sûretés en son article 3, comme un contrat par lequel la caution s’engage envers le créancier qui accepte, à exécuter l’obligation du débiteur si celui-ci n’y satisfait pas lui-même.

La caution ne sera alors tenue de payer la dette qu’en cas de non paiement du débiteur principal.

Mais quel est le sort de l’engagement pris par la caution au cas où elle venait à décéder ?

Il est de principe bien établi que, le patrimoine du de cujus passe à son héritier après sa mort.

Il en découle que la caution transmet à son héritier l’ensemble de ses engagements.

Supposons dans un premier temps qu’une personne se porte caution pour son ami lors de l’achat d’une automobile.

Au décès de cette personne (caution), son héritier devra-t-il supporter le paiement de l’automobile si l’acquéreur devenait défaillant ?

Supposons ensuite qu’une personne se porte caution lors de la location d’une maison pour un de ses fils.

Au décès de cette personne (caution), son héritier devra-t-il supporter les loyers impayés par le locataire dans le cas ou celui-ci ne les règlent plus ?

L’application au contrat de cautionnement du principe de la succession aux dettes du de cujus mérite alors qu’on s’y attarde un instant.

Dans le premier cas, il s’agit de cautionnement de dettes présentes et déterminées, l’héritier de la caution est tenu pour la dette de l’acquéreur puisqu’elle existait déjà au jour du décès.

L’engagement de garantie est transmis au décès de la caution à ses ayants cause universels ou à titre universel (héritiers et légataires autres que les légataires particuliers).

En revanche, dans le second cas, il s’agit d’un cautionnement de dettes futures et indéterminées, comme les loyers à venir, la réponse appelle alors plus de nuances.

Est-ce que les héritiers de la caution doivent garantir le paiement de toutes les dettes du débiteur principal couvertes par le cautionnement, y compris celles qui n’auraient pris naissance qu’après le décès de la caution, comme les loyers à venir, ou bien si l’obligation transmise a pour seul objet les dettes déjà nées au moment du décès ?

Pendant longtemps, la Cour de cassation française a estimé que l’obligation des héritiers de la caution ne se limitait pas aux dettes existant au jour de son décès mais s’étendait également aux dettes nées postérieurement.

La même chambre commerciale de la Cour de cassation française devait opéré un revirement complet deux ans plus tard en posant dans un arrêt de principe que, les héritiers de la caution décédée doivent garantir le paiement des dettes du débiteur principal qui étaient déjà nées au moment du décès mais, en revanche, n’ont pas à garantir le paiement des dettes du débiteur principal nées après le décès de la caution.

C’est cette dernière position de la jurisprudence française qui a été retenue par les rédacteurs de l’Acte Uniforme.

En précisant à l’alinéa 3 de l’article 25 de l’Acte Uniforme que, « les engagements de la caution (…) passent à ses héritiers uniquement pour les dettes nées antérieurement au décès de la caution », le législateur de l’OHADA va plus loin que son homologue français en tranchant définitivement le débat et en donnant à l’arrêt de principe de 1982 une force désormais incontestable.

La caution ne transmet pas d’engagements à son héritier pour les dettes nées après son décès.

Cette position du législateur semble logique dans la mesure où dans le cadre d’un cautionnement successif et général, le décès de la caution ne devrait avoir un effet extinctif qu’à l’égard des dettes futures non encore nées.

En conséquence, les héritiers ne sont tenus qu’au paiement des seules dettes garanties qui étaient nées à la date du décès de la caution. Dès lors que la dette du débiteur principal a pris naissance avant le décès de la caution, l’héritier reste tenu et ne peut se soustraire à l’exécution de l’obligation de paiement.

On pourrait donc déjà conclure que si le décès de la caution a un effet extinctif dans le cas d’un cautionnement de dettes futures et indéterminées, au sens de dettes non existantes mais éventuellement appelées à naître dans l’avenir, il ne produit pas le même effet dans le cas d’un cautionnement de dettes présentes et déterminées, au sens de dettes existantes.

Mais à partir de quel moment nait la dette de la caution ?

Il faut distinguer l’exigibilité de la dette de la caution de sa naissance.

Si l’on excepte l’hypothèse de la stipulation à son profit d’un terme plus éloigné que celui fixé au débiteur principal, la dette accessoire de la caution devient en principe exigible au moment même où l’est la dette principale. C’est à partir de ce moment que la caution peut être poursuivie.

La question de l’exigibilité de la dette de la caution trouve donc sa réponse, en principe, dans le caractère accessoire du cautionnement.

Il va de soi que le créancier ne peut pas poursuivre la caution alors que sa créance n’est pas exigible.

Il ne faudrait pas en revanche y comprendre que la dette de la caution nait à partir de son exigibilité.

L’engagement de payer la dette est transmis aux héritiers si la dette a pris naissance avant le décès de la caution, même si elle n’était pas encore exigible à cette date.

Supposons qu’une personne se porte caution pour l’octroi d’un prêt à la société dont il a la gestion. Six mois après son décès, la société traverse des difficultés financières et ne parvient plus à régler les échéances.

L’héritier du de cujus est-il tenu au remboursement ?

La déchéance du terme prévue à l’article 13 de l’Acte Uniforme, quelle qu’en soit sa cause, a pour effet de rendre la dette exigible.

Toute déchéance du terme même postérieure au décès de la caution n’a pour conséquence que l’exigibilité de la dette et non sa naissance.

S’agissant alors de dette à terme, le terme n’affecte que l’exigibilité de l’obligation de remboursement et non son existence, de sorte que la dette existe dès la formation du contrat de prêt.

Une dette devenue exigible seulement après le décès de la caution peut avoir sa naissance antérieurement au décès, soit à la date de l’engagement du débiteur principal et de la caution.

Les dispositions de l’article 25 de l’Acte Uniforme ne requièrent donc pas que l’obligation de la caution soit exigible lors du décès de celle-ci, mais seulement qu’elle ait pris naissance antérieurement au décès.

La naissance de la dette de la caution remonterait à la date de formation du contrat principal, soit à la remise des fonds au débiteur principal et à l’engagement de la caution.

L’obligation de règlement résultant d’un prêt ou d’une ouverture de ligne de crédit notamment est ainsi maintenue après le décès de la caution, passant à ses héritiers, mais non l’obligation de couverture résultant de la garantie d’un compte bancaire par exemple.

L’obligation de règlement, s’agissant de dettes par hypothèses nées avant le décès, doit indiscutablement être considérée comme transmise aux héritiers, même si ces dettes ne deviennent exigibles que postérieurement. Telle est, au demeurant, la solution résultant du droit commun de la transmission passive.

Tandis que l’obligation de couverture doit être considérée comme éteinte par le décès de la caution. Elle répond à la considération que si les obligations se transmettent, le lien contractuel est dénoué par le décès. Comment d’ailleurs le de cujus pourrait-il transmettre à ses héritiers des dettes qui n’existaient pas au jour de son décès ?

Il revient alors dès à présent aux juridictions de l’espace OHADA d’entériner l’idée émise par C. MOULY dans sa thèse de doctorat en ce qu’il faut distinguer entre obligation de règlement et obligation de couverture pour apporter une solution à la problématique du sort des engagements de la caution décédé.

Le décès de la caution et, plus généralement, toute transmission universelle du patrimoine d’une caution devraient donc être considérés comme des causes d’extinction de l’obligation de couverture de la caution, au même titre que la résiliation de l’engagement, l’arrivée du terme ou que l’extinction de l’obligation principale.

BREVES OBSERVATIONS SUR LE SORT DU BAIL COMMERCIAL DANS LES PROCEDURES COLLECTIVES DE L’OHADA


Le bail commercial est défini par l’Acte uniforme relatif au droit commercial général à son article 71, comme toute convention, même non écrite, existant entre le propriétaire d’un immeuble, et toute personne physique ou morale, permettant à cette dernière, d’exploiter dans les lieux avec l’accord du propriétaire, toute activité commerciale, industrielle, artisanale ou professionnelle.

Aux termes de l’article 25 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif, le débiteur qui est dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible doit faire une déclaration de cessation des paiements aux fins d’obtenir l’ouverture d’une procédure collective.

Lorsque les parties à un bail commercial sont en conflit, on fait généralement application des règles prévues par l’Acte Uniforme relatif au droit commercial général.

Mais quelles sont les règles applicables lorsque l’une des parties au bail commercial obtient l’ouverture d’une procédure collective ?

L’Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif fixe les règles de traitement des difficultés des entreprises, avec comme impératif la sauvegarde de l’entreprise ou l’apurement de son passif.

Il en découle que lorsque les parties à un bail sont en conflit, les règles habituelles se trouvent bouleversées en cas de procédure collective, laquelle apparaît comme une mise entre parenthèses des relations d’affaires, au terme de la quelle une décision définitive devra être prise : le redressement judiciaire ou la liquidation des biens.

Ce bouleversement profond intervient d’ailleurs tant en ce qui concerne la situation du preneur (I) que celle du bailleur (II).

I- LE REDRESSEMENT JUDICIAIRE OU LA LIQUIDATION DES BIENS DU PRENEUR

Pour mieux évaluer l’impact de la procédure collective du preneur sur le bail commercial, il est nécessaire d’analyser les aspects se rattachant directement à l’arrêt des poursuites individuelles, à la déclaration de créances et à la poursuite des contrats en cours.

L’arrêt des poursuites individuelles - En vertu de l’article 75 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif, le jugement d’ouverture de la procédure collective suspend ou interdit toute action tendant au paiement où à la résiliation d’un contrat pour défaut de paiement d’une créance née antérieurement au jugement d’ouverture.
L’arrêt des poursuites individuelles ne concerne toutes fois que les actions fondées sur les défauts de paiements et les voies d’exécution sur les meubles et les immeubles.

Cette décision n’interdirait donc pas :
- l’expulsion du preneur,
- la résiliation du bail pour d’autres manquements que le défaut de paiement graves et antérieurs à l’ouverture de la procédure collective,
- l’action en validation d’un congé avec refus de renouvellement pour motif grave et légitime notifié antérieurement au jugement d’ouverture.

La déclaration de créances – Il ressort des dispositions des articles 78 et suivants de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives que, à partir de la décision d’ouverture de la procédure, les créanciers doivent remettre au syndic une déclaration indiquant le montant et la nature de leurs créances.

S’agissant des loyers et charges échus antérieurement au jugement d’ouverture, le bailleur doit, comme tout créancier, déclarer sa créance dès lors que celle-ci est née antérieurement à l’ouverture de la procédure collective.

A défaut de déclaration au passif du preneur, la créance du bailleur est éteinte.

Cependant, une précision importante doit être faite quant au sort du dépôt de garantie.

Il semble qu’il faille admettre la compensation de plein droit avec les loyers restés impayés antérieurement au jugement d’ouverture, s’agissant des dettes connexes.

Aussi, l’interdiction de paiement des créances antérieures au jugement d’ouverture ne ferait pas obstacle au paiement par compensation de créances connexes.

La poursuite des contrats en cours – Conformément aux dispositions de l’article 97 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif, l’ouverture d’une procédure collective à l’encontre du preneur n’est pas une cause de résiliation automatique du contrat de bail, qui se trouve poursuivi de plein droit. D’ailleurs, est réputé non écrite toute stipulation contraire.

Cependant, aux termes de l’article 108 de l’Acte Uniforme sus cité, le syndic conserve seul, quelque soit la procédure ouverte, la faculté d’exiger l’exécution des contrats en cours, à charge pour lui de fournir à l’autre partie la prestation promise.

Le syndic en cas de liquidation des biens ou le preneur assisté du syndic en cas de redressement judiciaire, peut donc continuer le bail aux conditions prévues au contrat et avec tous les droits et obligations qui s’y attachent.

En revanche, s’il décide de ne pas poursuivre le bail, celui-ci est résilié sur simple congé formulé par acte extrajudiciaire.

Le bailleur quant à lui dispose de la possibilité de solliciter la résiliation du contrat de bail.
En effet, l’Acte Uniforme permet au bailleur de contraindre le syndic par une mise en demeure nécessairement écrite, à prendre position sur le sort du bail en le poursuivant ou en y renonçant.

Le syndic dispose alors d’un délai de 30 jours d’après les dispositions de l’alinéa 3 de l’article 108 précédemment cité, et peut :
- soit décider de poursuivre le bail,
- soit ne pas répondre à la mise en demeure, auquel cas le bail est résilié de plein droit et le bailleur dispose d’un privilège pour les douze derniers mois de loyer échus avant la décision d’ouverture de la procédure, pour les douze mois échus ou à échoir postérieurement à la décision d’ouverture de la procédure, ainsi que pour les dommages-intérêts qui pourront lui être alloués, conformément aux dispositions de l’article 98 de l’Acte Uniforme précité,
- soit renoncer à la continuation du contrat.
Aussi, le bailleur qui entend demander ou faire constater la résiliation du bail doit :
- pour les causes antérieures au jugement d’ouverture, introduire sa demande dans le mois suivant la deuxième insertion du jugement d’ouverture au journal d’annonces légales ou au journal officiel,
- pour les causes postérieures au jugement d’ouverture, introduire sa demande dans les quinze jours à compter de sa connaissance de la cause de résiliation.

S’agissant du paiement des loyers postérieurs à la poursuite du bail, il faut préciser que le syndic qui décide de poursuivre l’exécution du bail a l’obligation de payer les loyers.

A défaut, non seulement le syndic pourrait encourir l’application de la clause résolutoire mais aussi, le bailleur peut soulever l’exception d’inexécution comme le lui permet l’alinéa 1er de l’article 108 de l’Acte Uniforme précité.

Si le bailleur s’exécute néanmoins sans avoir perçu les loyers, il devient alors un créancier de la masse.

En revanche, le syndic qui opte pour la poursuite du contrat de bail devrait s’assurer qu’il disposer des fonds nécessaires à cet effet. A défaut, il pourrait se voir reprocher une faute suffisamment caractérisée pour mettre en jeu sa responsabilité.

II- LE REDRESSEMENT JUDICIAIRE OU LA LIQUIDATION DES BIENS DU BAILLEUR

Le législateur de l’OHADA a ignoré cette perspective, puisque l’Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives n’a été conçu et écrit que pour le redressement judiciaire ou la liquidation des biens du locataire.

Toutefois, la procédure collective à l’encontre du bailleur provoque des conséquences importantes sur le sort du contrat et l’indemnité d’éviction.

Le sort du contrat de bail – En vertu de l’article 108 précédemment cité, le syndic a la possibilité de décider de la continuation ou de la résiliation du contrat de bail en cours.

Le bailleur en redressement judiciaire ou en liquidation des biens peut-il, par l’intermédiaire du syndic, rompre unilatéralement le contrat de bail commercial dès lors que les dispositions de l’article 108 n’excluent pas cette possibilité ?

Il faudrait alors remarquer que la décision du bailleur de rompre unilatéralement le contrat de bail a pour conséquence de priver le locataire des dispositions protectrices de l’Acte Uniforme relatif au droit commercial général, notamment quant au droit au renouvellement du bail ou au paiement d’une indemnité d’éviction, qui sont d’ailleurs d’ordre public conformément à l’article 102 dudit Acte Uniforme.

Les Tribunaux devraient donc refuser de reconnaître au bailleur la possibilité de résilier le bail.

L’initiative de rupture ne devrait venir que du locataire interrogeant le bailleur en redressement judiciaire ou en liquidation des biens pour savoir s’il souhaite ou non poursuivre le bail.

Le sort de l’indemnité d’éviction – Aux termes de l’article 94 de l’Acte Uniforme relatif au droit commercial général, le bailleur peut s’opposer au droit au renouvellement du bail en réglant au locataire une indemnité d’éviction.

En cas d’ouverture d’une procédure collective à l’encontre du bailleur, postérieurement à la délivrance d’un congé offrant une indemnité d’éviction à son preneur, ce dernier, bien que sa créance d’indemnité d’éviction ne soit ni liquide, ni certaine, puisque le bailleur peut toujours y renoncer et exercer son droit de repentir, doit déclarer celle-ci au syndic.

A défaut, le locataire pourrait se trouver déchu de son droit à indemnité d’éviction.