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31/07/2009

DE L’EXPERTISE EN DROIT DES SOCIETES OHADA

« Le procès » peut se définir comme l’un des mécanismes permettant, s’il arrive à son terme, de juger dans la limite la plus juste possible, des faits litigieux. Il s’agit pour le juge d’appliquer la règle de droit adéquate afin que soit retrouvée la paix sociale. Le juge ne devra pas faire l’économie des connaissances les plus exactes des éléments de la situation litigieuse qu’il faut apprécier, et à partir desquels il prendra définitivement position.

Durant le procès, les parties apportent au juge un ensemble d’éléments parfois contradictoires dont l’analyse permet d’avoir une idée de la situation conflictuelle et même dans certains cas, une probable prise de position. Le juge peut s’estimer suffisamment éclairé par les convictions des parties, et mettre à profit ses propres connaissances techniques et scientifiques pour trancher le litige.

Mais parfois, la seule reconstitution des faits, ne permet pas au juge de rendre dans l’impartialité la plus totale et en toute connaissance de cause sa décision. Encore faudrait-il que les éléments du litige soient maîtrisés dans leur ensemble. Pour cela, il faut l’intervention ou encore le regard de celui-là qui a fait des éléments du litige sa spécialité, et dont les connaissances sur la question sont reconnues par tous ; voilà l’expert.

Ce sont les difficultés rencontrées lors des procès dans la recherche et la matérialisation de la vérité qui sont à l’origine de cette institution très ancienne, qu’est l’ « expertise ».

Par ailleurs, il faut rappeler que le droit des sociétés doit aujourd’hui faire face aux profondes mutations qui secouent le monde des affaires. L’usage de nouveaux moyens de contrôle ainsi que le développement de nouvelles méthodes de gestion ont fondamentalement changé l’organisation générale de l’entreprise, qui est devenue le siège d’intérêts divers qu’il importe de gérer au mieux et dont la protection est désormais une priorité.

On doit, de plus en plus, de faire de la lumière où régnaient jadis l’obscurantisme et l’opacité.
Il est devenu impératif au sein des entreprises du continent, de rééquilibrer les rapports de force qui coexistent entre les divers acteurs sociaux .

C’est dans un tel contexte qu’il faut situer « l’expertise en droit des sociétés OHADA », toute la problématique étant celle de la place et du rôle de cette institution dans le droit actuel des sociétés, compte tenu des dernières évolutions législatives .Il y a bien longtemps que les arpenteurs de Rome faisaient la mesure des terres, que les huissiers-priseurs estimaient déjà les biens, et la Novelle 64 nous apprend que l’évaluation des légumes était faite par les jardiniers de Constantinople.

La place de l’expertise n’a pas vraiment changé à cet égard. Il s’agit toujours de prendre des hommes et des femmes de chaque branche d’activité pour éclairer ce qui dépend de la connaissance de leur art.

Cependant, si l’histoire n’a pas modifié la place de cette institution dans notre système juridique, son rôle ainsi que son autorité ont accru de façon considérable durant ces dernières années.
Le droit des sociétés de l’OHADA n’est pas resté en marge de cette évolution d’ensemble sur l’institution qui, en s’inscrivant dans une logique de protection de l’intérêt social, s’est érigé peu à peu en garant de la transparence dans la gestion sociale, tout en participant à l’évaluation de l’entreprise en terme de valeur et de risque.

Il s’agirait donc aujourd’hui de répondre à une double préoccupation :

- Comment à travers l’institution, garantir la transparence sur la gestion sociale ?
- Comment partir de l’institution pour obtenir une évaluation de l’entreprise ?

I- LA TRANSPARENCE SUR LA GESTION SOCIALE

A- UNE SOURCE D’INFORMATION SUR LA GESTION SOCIALE: Du rôle de l’expertise de gestion

B- UN MOYEN DE CONTROLE DE LA GESTION SOCIALE : De l’utilisation de l’expertise « à futur »

1- L’originalité de l’expertise « à futur » de l’article 167 du CPCCS malien
2- La confrontation entre l’article 159 de l’AUSC de l’article 167 du CPCCS malien ou la concurrence indélicate de l’article 167

II- L’EVALUATION DE L’ENTREPRISE

A- UNE SOURCE D’INFORMATION SUR LE PRIX DE CESSION DE L’ENTREPRISE: De l’utilité de l’expertise de cession de droits sociaux

B- UN MOYEN D’APPRECIATION DE LA SITUATION ECONOMIQUE ET FINANCIERE DE L’ENTREPRISE : De l’importance de l’expertise en diagnostic d’entreprise dans le traitement des défaillances des sociétés

En définitive,

On peut faire le constat selon lequel, l’entreprise est marquée de plus en plus par une plus ample diffusion du pouvoir et des responsabilités qui a changé son organisation générale.

On assiste désormais à une décentralisation de la gestion sociale qui s’accompagne d’un accroissement sensible des contrôleurs de gestion, des audits internes et externes, qui ont entraîné une décentralisation du dialogue social. C’est tout le système par lequel les entreprises sont dirigées et contrôlées qui a été remanié par l’OHADA.

L’expertise qui, a pour instrument l’information économique, apparaît incontestablement comme une source de transparence sociale. C’est cette information économique qui traduit la gestion sociale et au-delà provoque son contrôle, la notion de « contrôle » devant être entendu ici comme recouvrant l’idée de « surveillance ».

Cependant, si l’institution permet aux acteurs sociaux de percer les mystères de la gestion sociale à travers les informations qu’elle diffuse, il ne faudrait pas en revanche qu’elle devienne un obstacle à la gestion. On peut craindre que s’instaure, comme « une peur du gendarme », la peur de l’institution qui, rendrait alors les dirigeants sociaux frileux dans leur décision.

De toutes les façons, le juge devrait juguler les demandes d’expertise afin de prévenir tout abus qui, nuirait au bon fonctionnement de l’entreprise. Par conséquent, il devra avant d’ordonner une telle mesure, faire une appréciation approfondie de la demande à lui faite, car il reste le seul rempart face à une utilisation abusive des techniques expertales en droit des sociétés.

Le fait pour des actionnaires de solliciter une expertise de gestion peut les exposer même si ce n’est que de façon exceptionnelle, à la mise en œuvre de leur responsabilité civile pour abus de droit, lorsque leur demande repose sur de simples allégations dépourvues de fondement et procèdent d’une volonté de remettre en cause des actes de gestion régulièrement adoptés par une majorité d’associés .

Il faut donc d’un côté garantir l’information économique par l’expertise de gestion et renforcer le contrôle de la gestion sociale par l’expertise préventive, et de l’autre éviter que des demandes abusives ne paralysent la vie sociale.

Par ailleurs, le recours au tiers estimateur devient une pratique impérieuse. Son développement est dû essentiellement à la complexité actuelle des relations d’ordre économique et juridique entre les protagonistes sociaux, d’où il résulterait l’impossibilité pour les parties d’avoir connaissances de pure technique indispensable pour apprécier les situations dans lesquelles elles se trouvent. Le législateur ou le juge ne peut donner que des directives très générales en la matière. Comme le relève le professeur A. VIANDIER, « le rôle des magistrats n’est pas d’évaluer, auraient-ils reçu la formation appropriée » .

C’est sans doute ce qui a amené le législateur de l’OHADA à élargir considérablement le domaine d’application de l’article 59 de l’AUSC, l’adaptant à l’évolution de la vie commerciale et des activités économiques.

Notre souhait est de voir se multiplier dans l’espace OHADA, les procédures expertales, dont le rôle en droit des sociétés permet aujourd’hui de reconsidérer le visage qui est donné à l’entreprise.

En revanche, dans le but de protéger la partie la plus faible, c’est-à-dire celle en situation d’infériorité, le domaine du contrat se rétrécit chaque jour davantage au profit d’une certaine justice contractuelle et le principe de l’autonomie de la volonté dont l’intangibilité conférait encore il y a quelques années la valeur d’un dogme, bien que toujours respecté, tend de plus en plus à être relégué au rang des théories.

Reste alors à s’interroger sur le fait de savoir si l’institution qu’est l’expertise ne fait pas aujourd’hui évoluer la notion d’associé en droit des société OHADA.

GESTION DE CRISE EN OHADA

GESTION DE CRISE EN OHADA :
Anticipation conventionnelle et statutaire - Gestion négociée et règlement des conflits internes

Mamadou I. KONATE
Avocat Associé - JURIFIS CONSULT

Bakary DIALLO
Docteur en droit privé - ATER à l’Université de Paris I Sorbonne

Bérenger MEUKE
Docteur en droit des Affaires - Avocat au Barreau de Lyon

La survenance d'un conflit entre actionnaires constitue l’un des nombreux avatars pouvant paralyser le fonctionnement normal des organes sociaux et mettre en danger la pérennité de l’entreprise et la poursuite de l’exploitation.

Par nature, l’entreprise, créatrice de richesses est souvent l’objet et le réceptacle d’intérêts divergents, conflictuels, mettant aux prises des actionnaires, avec pour conséquences, d’importantes menaces sur le fonctionnement et l’existence de l’exploitation.

Les exemples ne manquent pas : deux groupes d’actionnaires devenus antagonistes bloquent toute décision qui permettrait de reconstituer le Conseil d'Administration ; les dirigeants refusent pendant de très nombreuses années toute distribution de dividendes ; ou encore, un actionnaire disposant d'une minorité de blocage en assemblée générale extraordinaire interdit toute modification statutaire, pourtant indispensable à la survie de la société, etc.

Au regard de cette situation, la préoccupation majeure des fondateurs de la société doit être de créer et de gérer les instruments de résolution des situations difficiles avant qu’elles ne dégénèrent en conflit.

Or en dehors, des mécanismes légaux mis en place par l’Acte uniforme sur le droit des sociétés commerciales et du GIE ( AUSCGIE) ; il est essentiel d’anticiper autant que faire se peut ces incidents par la mise en place de différents instruments : idéalement au moment de la création de la société, ou à l’occasion de l’acquisition d’une société existante, ou encore, au cours de son existence, lors d’une modification dans la « population » des associés (apparition de nouveaux actionnaires, changements générationnels, ouverture du capital…).

Notre analyse déclinera en deux grandes parties :

- Les Mécanismes légaux de prévention et de règlement des conflits ;
- Les Mécanismes conventionnels de prévention et de règlement des conflits.

I. Les Mécanismes légaux de prévention et de règlement des conflits

A- Les dispositions légales de préventions des conflits entre actionnaires
1) Les droits sociaux droit de participer aux décisions de la société
droit d’être désigné aux fonctions sociales
droit d’agir en justice
2) Les Droits financiers de l’actionnaire
droit aux bénéfices
droit de souscription aux augmentations du capital
droit de négocier ses actions

B- Les dispositions légales de règlement des conflits
1) Le recours au juge national
la désignation d’un administrateur provisoire
l’action d’abus de majorité
l’abus de minorité
2) Le recours à l’arbitrage
Sur le choix des arbitres
Sur la simplification de la procédure
Sur la discrétion

II. Les Mécanismes conventionnels de prévention et de règlement des conflits

A- Les Pactes d’actionnaires : mécanisme de prévention des conflits
1) Les Conventions de vote entre actionnaires
2) Les Conventions relatives à la cessibilité des droits sociaux

B- Mécanismes conventionnels de règlement de litige
1) Techniques fondées sur la disparition de l’actionnariat d’une des parties au conflit
2) Les Modes alternatifs de résolution des conflits

LA GOUVERNANCE PROCESSUELLE EN OHADA

LA GOUVERNANCE PROCESSUELLE EN OHADA

A une époque où la bonne gouvernance passe pour être le meilleur vecteur de développement durable des nations africaines, la problématique de la gouvernance processuelle ou judiciaire constitue l’un des défis principaux à relever.

Lorsque Guy CANIVET (Premier Président à la Cour de cassation française) et Stephen BREVER (Juge à la Cour suprême des Etats-Unis) s’expriment le 17 février 2007 sur les ondes de la radio France Culture par rapport au thème « Penser la gouvernance judiciaire », le débat porte en réalité sur les conditions d’un meilleur fonctionnement des tribunaux au regard des exigences de l’Etat de droit.

Dans les ouvrages internationaux, la formule renvoie principalement au respect des libertés publiques et à la sécurité juridique des opérations économiques.

Toute réflexion et action en direction d’une « gouvernance processuelle » optimale n’aurait donc pas d’autre objectif que d’assurer et garantir une meilleure contribution des tribunaux au développement économique et à la promotion de la démocratie dans l’espace OHADA.

Il est donc surtout question, de favoriser l’existence d’une justice crédible, efficace, impartiale et favorable au développement économique du continent africain.

A cet effet, s’agissant des reformes techniques pour l’accessibilité de la justice, tout l’effort devrait tendre à la poursuite des réflexions relatives à la procédure de recouvrement de créance, aux sûretés et voies d’exécution, à la gestion des difficultés des entreprises, à l’articulation et à la cohabitation des hautes juridictions communautaires en OHADA (Les Cours de Justice de la CEDEAO et de la CEMAC) et la CCJA, aux mécanismes de l’arbitrage commerciale et à la transparence de la justice arbitrale en OHADA.

La gouvernance processuelle constitue à n’en point doutée, le gage de la sécurité judiciaire et une condition absolument nécessaire pour la relance des investissements sur le continent et la sauvegarde des intérêts des investisseurs.

Cependant, au niveau de chaque Etat membre de l’OHADA, l’amélioration de la gouvernance processuelle passera par les domaines d’actions que sont :

1- La mise en place d’une justice proche du justiciable ;
2- L’amélioration de la couverture territoriale en juridictions pour faciliter l’accès à la justice ;
3- La mise en place d’une justice rapide et respectée, en accélérant la rédaction des décisions de justice et leur exécution ;
4- La réduction de la charge de travail dévolue aux magistrats, au moyen d’une augmentation de leur nombre ;
5- L’accélération de la formation des magistrats et auxiliaires de justice (formation des juge en droit économique, financier et social) ;
6- L’équipement des juridictions en centres de documentation ;
7- La poursuite du travail d’harmonisation des législations nationales aux textes de l’OHADA ;
8- La lutte contre la corruption.