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07/05/2009

La liberté de l’expert dans la détermination des critères permettant l’évaluation de la valeur des droits sociaux à céder - Cass com 5 mai 2009

Note sous Cass com., 5 mai 2009, n° 08-17465

Par un arrêt du 5 mai 2009, la Chambre commerciale de la Cour de cassation s’est prononcée sur la question de la liberté de l’expert quant à la détermination des critères permettant d’évaluer les droits sociaux à céder.

En l’espèce, plusieurs associés d’une société civile avaient été exclus suite à des assemblées générales. Sur le fondement de l’article 1843-3 du Code civil, le Président du Tribunal de Grande Instance, statuant en la forme des référés avait désigné un expert avec pour mission de déterminer la valeur de rachat des part sociales.

Dans son ordonnance, le Tribunal avait précisé que l’expert devait procéder à cette évaluation en toute liberté et devait écarter la méthode de calcul prévue par les statuts de la société.

Un appel a été formé contre cette ordonnance.

La Cour d’appel a annulé l’ordonnance et a jugé que le Président du tribunal avait excédé ses pouvoirs en estimant que l’expert devait « procéder en toute liberté » et « écarter l’application de la méthode de calcul prévue par les statuts ».

Pour la Cour d’appel, seuls les statuts devaient guider l’expert dans sa mission.

La Cour de cassation a cassé cet arrêt au motif que, « dans tous les cas où sont prévus la cession des droits sociaux d'un associé, ou le rachat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné, soit par les parties, soit à défaut d'accord entre elles, par ordonnance du président du tribunal statuant en la forme des référés ; que seul l'expert détermine les critères qu'il juge les plus appropriés pour fixer la valeur des droits, parmi lesquels peuvent figurer ceux prévus par les statuts ».

Les hauts magistrats indique qu'en précisant à l’expert, la méthode à suivre, la Cour d'appel a violé l'article 1843-4 du Code civil.

Cette jurisprudence de la Cour de cassation pourrait venir au secours du juge de l’espace OHADA s’agissant des règles et mécanismes devant gouverner l’application de l’article 59 de l’Acte Uniforme relatif au Sociétés Commerciales et GIE (AUSC) qui précise que « dans tout les cas où est prévue la cession des droits sociaux d’un associé, ou le rachat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée, à défaut d’accord amiable entre les parties, par expert désigné, soit par les parties, soit à défaut d’accord entre elles, par décision de la juridiction compétente statuant à bref délai ».

En réalité, cette disposition de l’AUSC est largement inspirée de l’article 1843-4 du Code civil français, de sorte qu’on pourrait aisément envisager, la transposition dans l’espace OHADA, de la jurisprudence découlant de l’arrêt rendu le 5 mai 2009 par la Cour de cassation.

Pour que l’expertise instituée par l’article 59 de l’AUSC soit efficace et permette d’atteindre les objectifs fixés par le législateur de l’OHADA, la mission de l’expert doit répondre aux conditions de liberté dans le choix des méthodes de calcul et des techniques d’évaluation.

L’efficacité de son travail exige qu’il ait la liberté dans le choix des moyens et actions nécessaires à la détermination exacte de la valeur des titres sociaux. A défaut, il ne sera rien d’autre qu’un « simple calculateur ».

Lectures conseillées :

- R. Mortier, Le tiers estimateur de l'article 1843-4 du Code civil doit respecter la méthode de calcul statutaire » : Dr. sociétés 2008, comm. 47
- B. MEUKE, Expertise et prix de titres sociaux dans l’OHADA « étude de l’article 59 de l’AUSC » :
www.ohada.com ohadata (D-05-58)