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24/06/2011

LA GARANTIE DE FINANCEMENT EN OHADA: L'AGENT DE SURETE

LA GARANTIE DE FINANCEMENT EN OHADA: L'AGENT DE SURETE (*)

L’AUS révisé introduit en OHADA deux sortes de nouveaux mécanismes de garantie des financements d’une part, il réglemente des sûretés qui étaient jusqu’alors totalement inconnues du droit de l’OHADA (la cession de créance à titre de garantie et le transfert fiduciaire de somme d’argent, l’admission de ces deux formes de propriétés-sûretés, ainsi que l’introduction de la réserve de propriété) et, d’autre part, il introduit une nouvelle technique de gestion des sûretés en créant un régime juridique de « l’agent des sûretés ».

Dans l’optique de favoriser davantage les investissements importants réalisés par des pools bancaires, le projet de réforme de l’AUS a consacré expressément la notion d’agent des sûretés, tout en s’efforçant de lui donner un cadre adapté qui évite les écueils rencontrés en droit français par l’actuel article 2328-1 du Code civil.

La réglementation de son cadre juridique occupe les articles 5 à 11 de l’AUS révisé.

Selon l’article 5, « toute sûreté ou autre garantie de l’exécution d’une obligation peut être constituée, inscrite, gérée et réalisée par une institution financière ou un établissement de crédit, national ou étranger, agissant, en son nom et en qualité d’agent des sûretés, au profit des créanciers de la ou des obligations garanties l’ayant désigné à cette fin ».

On retrouve dans cet article 5, le texte de l’article 2328-1 du Code civil (« toute sûreté réelle peut être constituée, inscrite, gérée et réalisée pour le compte des créanciers de l’opération garantie par une personne qu’ils désignent à cette fin dans l’acte qui constate cette obligation »).

Mais on peut relever des différences significatives entre les deux institutions.

 Tout d’abord, l’article 5 ne se réfère pas aux seules sûretés réelles mais à toutes les sûretés et même, plus généralement, aux garanties de l’exécution d’une obligation, ce qui va permettre à l’agent des sûretés de gérer des délégations de créance ou des promesses d’affectation hypothécaire.

 Ensuite, la qualité d’agent des sûretés est ici réservée aux seules banques ou établissements de crédit nationaux ou étrangers, c’est-à-dire à des créanciers dont l’activité fait l’objet d’un agrément et d’un contrôle étatiques, ce qui n’est pas sans évoquer le fait que l’activité de fiduciaire, en France, soit réservée à des personnes dont le statut implique un contrôle étatique, ou le respect de règles déontologiques, et qui sont soumises à l’obligation d’effectuer des déclarations de soupçons si elles découvrent des indices d’une opération de blanchiment.

 Enfin, la désignation de l’agent des sûretés n’est pas obligatoirement faite dans l’acte qui constate l’obligation garantie: elle peut être effectuée postérieurement, ce qui donne beaucoup plus de souplesse au mécanisme.

L’agent des sûretés peut agir au profit des membres du syndicat bancaire mais aussi en son nom. D’où la nécessité pour les tiers de savoir avec précision à quel titre ce dernier intervient. Pour ce faire, l’article 7 prévoit que «lorsque l’agent des sûretés agit au profit des créanciers de la ou des obligations garanties, il doit en faire expressément mention et toute inscription d’une sûreté effectuée à l’occasion de sa mission doit mentionner son nom et sa qualité d’agent des sûretés ».

Lorsque ces conditions sont remplies, les tiers pourront se fier à l’apparence de pouvoirs de l’agent des sûretés puisque l’article 8, alinéa 1er, du texte énonce que « sauf stipulation contraire et pour tout ce qui a trait aux obligations garanties, les créanciers sont représentés par l’agent des sûretés dans leurs relations avec leurs débiteurs, leurs garants, ainsi que les personnes ayant affecté ou cédé un bien en garantie de ces obligations, et les tiers ».

Ce texte pose, en effet, une présomption de pouvoir qui va jouer au profit des tiers, car ceux-ci sont dès lors fondés à considérer que l’acte accompli par l’agent des sûretés entre bien dans les pouvoirs qui lui ont été conférés, sauf à ce que l’acte limitant les pouvoirs de l’agent ait été porté à leur connaissance.

S’agissant du cas particulier des actions en justice, cet article ajoute, dans son alinéa 2, que « dans la limite des pouvoirs qui lui ont été conférés par les créanciers de la ou des obligations garanties, l’agent des sûretés peut intenter toutes actions pour défendre leurs intérêts, y compris en justice, la seule indication qu’il intervient en sa qualité d’agent des sûretés étant suffisante ».

Ceci permet à l’agent des sûretés de ne pas avoir à justifier d’un mandat spécial chaque fois qu’il veut exercer une action en justice, ce qui est particulièrement utile lorsqu’il a besoin de déclarer une créance à la procédure collective du débiteur de l’obligation garantie.


(*) Vr sur le sujet Pierre CROCQ « LES GRANDES ORIENTATIONS DU PROJET DE REFORME DE L’ACTE UNIFORME PORTANT ORGANISATION DES SURETES» : Droit & Patrimoine N° 197 Novembre 2010